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veut, dans certaines de leurs coutumes, est tempéré, et au-delà, par un ensemble d’institutions tout-à-fait démocratiques Qu’il y ait, dans la constitution qui les régit, des incohérences, des contradictions évidentes, elles ne s’en émeuvent guère, Car la masse du bien l’emporte de beaucoup sur celle du mal. Loin de se laisser entraîner par le mouvement qui se fait autour d’elles, de se jeter dans le courant des grandes idées qui traversent le globe, elles s’obstinent prudemment à former un petit monde à part. Faire fructifier le plus possible le peu de terre que la Providence leur a départi, assurer, par la navigation et le commerce, l’existence et le bien-être d’une population toujours croissante tel est le problème qu’elles s’appliquent incessamment à résoudre ; là se bornent leur politique et leurs théories humanitaires. Le droit de tout dire et de tout imprimer, ce droit si dangereux ailleurs, les îles de la Manche le possèdent dans sa plénitude, et là, aucun citoyen n’en a jamais abusé. Dans ce pays d’ordre et de bon sens, on joint au culte du passé le respect le plus inaltérable pour la religion, la famille et la propriété. On y reconnaît qu’il y a des choses sacrées, préexistantes à la société elle-même ; puisqu’elles en sont la base. Certains esprits, préoccupés de régénération sociale, plaindront peut-être ces Normands arriérés qui n’ont pas assez d’imagination pour s’éprendre des rêves de l’avenir. À cela, les habitans de Jersey et de Guernesey y répondront qu’ils attendent pour commencer leurs réformes que les essais tentés ailleurs aient réussi. Jusque-là ils se contenteront, nous en avons la certitude, d’avoir fait de leurs îles une contrée heureuse et florissante, l’asile de la vrai liberté et la terre promise de tous les proscrits


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