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de tout enseignement public à la concurrence, et ensuite si, dans l’état de nos croyances, il peut y avoir un enseignement officiel quelconque donné sans danger au nom du gouvernement. Quelques principes sont donc nécessaires à établir en commençant, et nous le ferons en termes qui, sans avoir rien de trop rigoureux, ne laisseront, s’il se peut aucune incertitude sur notre pensée véritable.

Le plus simple, en effet, en pareille matière, est d’aller droit au but et de dire tout d’abord où l’on, en veut venir. Or voici, sur les deux questions que nous venons de poser, notre réponse sans déguisement.

D’une part, nous voulons la liberté d’enseignement pleine et entière, la liberté du projet de loi de M. de Falloux, faute de mieux et si on ne peut obtenir davantage ; — une liberté plus complète, plus radicale, une séparation plus entière de l’enseignement de l’état et de l’enseignement libre, si l’esprit public le permet, et si on peut trouver pour l’établir une majorité d’assemblée nationale qui s’y prête, et nous indiquerons même à tout hasard, sur la manière d’y arriver un jour, quelques idées qui appellent l’examen et que le temps mûrira.

Cela dit, nous croyons que l’Université non-seulement doit être maintenue, mais activement et profondément réformée. Nous croyons que la réforme de l’Université reste, après comme avant la liberté d’enseignement, la véritable affaire urgente en matière d’éducation publique. La liberté d’enseignement, quelque grande qu’on la suppose, la liberté d’enseignement comme en Belgique et plus qu’en Belgique, nous a toujours parti un palliatif très impuissant aux maux de notre éducation. Et cela, suivant nous, par une raison très simple, c’est que ce n’est pas l’Université qui a fait la société à son image, mais la société qui a plié l’Université à ses tendances. L’Université a eu le tort de se laisser faire, voilà tout.

Tous ces vices, en effet, que nous avons signalés en les déplorant, ce n’est pas l’Université qui les a d’elle-même et pour son plaisir inoculés à la jeunesse. Il n’y a qu’un esprit d’opposition inexpérimenté qui se figure trouver chez les dépositaires du pouvoir, dans un pays libre, ces volontés machiavéliques de corruption préméditée. Le pouvoir, en tout genre, a beaucoup trop à faire, par le temps qui court, pour vivre et se défendre ; il n’a pas le loisir de songer à mal. Le pouvoir sort de la société, il en a les maux, il en subit à chaque instant la contagion ; il les combat timidement, dans la mesure de ses forces, qui sont petites, et en ayant soin de ne pas se mettre trop d’embarras sur les bras. Est-ce l’Université, par exemple, qui a inspiré à tous les pères de famille, en France, l’assez sotte vanité de faire donner à tous leurs enfans, sans se préoccuper de leur carrière future, une éducation littéraire ? Plus d’une fois, au contraire, elle a essayé de détourner, en élevant la force des examens, les concurrens inhabiles. Puis les sollicitations, les obsessions individuelles sont arrivées ; elle a laissé briser