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le partage de la pologne.

nais opposés aux améliorations les plus justes, les plus simples et au fond les plus élémentaires. Le croirait-on des péages établis à l’entrée des provinces, une sorte de douane, faible obstacle au débordement de la contrebande, quelques taxes sur des objets de nécessité, d’autres sur le luxe, les rentrées dont la perception constitue dans tous les pays une des sources principales de la fortune et de la sécurité publiques, l’assiette d’un impôt à peu près régulier, révoltèrent toute la nation, qui ne voulut jamais y consentir. Les difficultés devinrent encore plus insurmontables lorsque les réformateurs essayèrent d’abolir le liberum veto et de substituer dans le vote des lois la majorité, ou, comme on le disait lors la pluralité à l’unanimité absolue. Ici, la tentative essuya une double résistance ; il fallut s’arrêter non-seulement devant les préjugés nationaux mais devant l’intervention étrangère.

Enfin, après avoir envoyé une députation à Pétersbourg pour remercier l’impératrice de son appui et pour lui demander de nouvelles troupes, la diète se confédéra, c’est-à-dire qu’elle se mit à l’abri d’une dissolution en se déclarant en permanence jusqu’à la nomination d’un roi. Elle avait eu soin auparavant de proscrire le grand-général comte Braniçki et le prince Radziwil. Tous deux avaient quitté Varsovie immédiatement après la rupture de la diète ; à la tête d’une nombreuse noblesse, ils avaient repris les armes, le comte dans la grande Pologne, le prince en Lithuanie. Le sort les avait d’abord favorisés. Le prince et la princesse Radziwil, qui combattait aux côtés de son mari, remportèrent un avantage sur les Russes à Slonnim ; mais, poursuivi par des forces supérieures, Radziwil se jeta sur la frontière de Moldavie Il demanda un asile aux Turcs, qui ne lui accordèrent que la voûte du ciel et l’eau des citernes. Cet aventureux Radziwil pensa mourir de denûment et de faim.

Braniçki fut plus heureux suivi de quelques amis, il se retira dans le comté de Zips, palatinat polonais, enclavé dans la Hongrie, comme pour servir d’appât à l’ambition autrichienne. Il y reçut un émissaire français : c’était un homme de robe, qui ne lui apportait pas d’argent, mais en revanche le traitait d’altesse et lui promettait le collier de la Toison-d’Or de la part de l’Espagne, à la recommandation de la France. Le grand-général était très vain ; il aimait les complimens et les colliers ; néanmoins il espérait mieux. Le gouvernement français, complètement découragé, jugeait les affaires des patriotes « entièrement désespérées, » et déclarait « qu’il ne leur restait plus qu’à soumettre en faisant le meilleur accommodement possible. » Ses trois agens, l’ambassadeur, le résident et le consul, étaient toujours à Varsovie aigris, divisés, abandonnés par leur cabinet et trompés par