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et de la fainéantise, vit de bananes et de cocos. Comme à Maurice, comme à Bourbon, c’est de l’Inde qu’il faudra tirer des travailleurs pour la culture de Mayotte, et l’on conçoit tout d’abord combien sa position écarté des grandes voies de commerce, de tout centre d’affaires, la met dans une condition défavorable. Des fièvres de même nature que celles de Madagascar déciment les colons ; nos équipages pendant la saison de l’hivernage, ont fort à souffrir des pluies torrentielles des étouffantes chaleurs et des maladies qui les minent. L’île de Pamanzi est plus saine, on y trouve de bons pâturages ; malheureusement elle manque d’eau : les bestiaux des anciens habitans étaient obligés de passer à mer basse sur la presqu’île de Zaoudzi pour s’y désaltérer avec l’eau de quelques puits qu’on y a creusés. Ni par sa position, ni par la pauvreté de son sol, Mayotte ne justifie les merveilles que notre imagination y avait rêvées. Cependant, si l’on veut bien se tenir dans la réalité, Mayotte, au milieu des Comores, nous assure, dans le canal de Mozambique, une petite influence que nous devons nous garder de dédaigner. Ils sont si rares les points du globe où flotte encore le pavillon de la France !


Le tableau que nous venons de tracer des établissemens français dans l’Océan indien n’a rien de flatteur pour notre orgueil national ; le souffle de février semble avoir tari en eux les sources de la vie : ce qu’ils ont à redouter surtout aujourd’hui, c’est l’oubli de notre pays. Peut-être appartient-il au pouvoir sorti le 10 décembre des entrailles de la France ; à ce pouvoir dont la mission réparatrice semble être de guérir une à une les plaies dont le gouvernement provisoire a déchiré la patrie, de faire luire sur ces lointaines contrées un rayon d’espérance, en multipliant les liens qui les attachent à la métropole. Il y a dans nos codes une loi qui jusqu’ici n’a pu recevoir son application, faute d’un lieu convenable pour la mettre en pratique c’est la déportation. Ce lieu, l’Océan indien seul peut nous l’offrir aujourd’hui, car le fatal souvenir de Sinamary ne permet pas de nommer la Guyane, et nous n’osons désigner les Marquises à cause de leur éloignement, de leur stérilité, surtout de leur isolement de tout centre d’affaires soumis à notre influence. En présence des haines furieuses dont certains esprits sont possédés contre toute autorité légale, la société veut se défendre énergiquement : le premier devoir du gouvernement est de frapper de terreur ou tout au moins de réduire à l’impuissance les irréconciliables ennemis de l’ordre social. Pour cela, il faut les éloigner de cette France dont ils ont juré la ruine ; mais le crime a ses degrés, le châtiment aussi doit avoir les siens. Parmi les hommes armés contre l’ordre et les lois,