Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 4.djvu/570

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tous les agens diplomatiques, — plus, le droit de garantir la paix extérieure de l’empire et de prendre les mesures nécessaires au maintien de cette paix ; elle devait enfin décider seule de la paix et de la guerre. » Voilà les prétentions de la Prusse, et c’est à ces prétentions que la Bavière résistait, stipulant en quelque sorte pour l’Autriche, mais au fond stipulant pour elle-même et pour les petits états de l’Allemagne, que le système prussien médiatisait infailliblement.

En défendant ainsi la cause des petits états, la Bavière est-elle devenue plus populaire en Allemagne ? En Bavière même, les principes de M. de Pfordten sont loin d’être unanimement accrédités. Le Correspondant de Nuremberg fait remarquer que M. de Pfordten ne défendait point contre la Prusse une grande cause morale, celle de l’unité de l’Allemagne ; il défendait ce qu’on appelle en Allemagne le particularisme bavarois. Les particularistes, en Allemagne, sont ceux qui préfèrent à l’Allemagne unitaire qu’on rêvait à Francfort l’existence individuelle des petits états de l’Allemagne. Le Correspondant de Nuremberg fait remarquer en même temps que, dans cette régénération entre la Prusse et la Bavière, c’étaient deux particularismes qui étaient aux prises : le particularisme bavarois et le particularisme prussien. Le Correspondant, en effet, n’est pas dupe de l’attachement que la Prusse affecte pour l’unité de l’Allemagne. Elle veut l’unité de l’Allemagne à la condition que la Prusse en sera la tête : elle veut, pour parler le langage savant des journaux allemands, elle veut l’hégémonie prussienne bien plus que l’unité allemande.

Le particularisme est bien plus en faveur dans les cours que dans le peuple. Comme, l’Allemagne a long-temps souhaité et appelé l’unité, elle ne peut pas encore se décider à y renoncer, et elle en cherche la moins inexacte image, n’espérant pas en avoir la réalité. Les petits états, au contraire, chérissent le particularisme c’est-à-dire leur indépendance individuelle. Ils sentent bien qu’ils ne sont pas assez forts pour se protéger eux-mêmes contre les insurrections qui éclateraient sur leur territoire. Il leur faut donc quelque part une gendarmerie qui maintienne l’ordre chez eux, et tant que l’Autriche avait sur les bras l’Italie et la Hongrie, il n’y avait que la Prusse qui pût servir de gendarmerie en Allemagne. Les petits états se rattachaient donc à la Prusse. Depuis la recouvrance de l’Autriche, les petits états ont eu à choisir entre deux gendarmeries et ils se sont naturellement tournés vers celle qui, par ses traditions semblait la plus favorable à l’existence des petits états et qui n’avait jamais penché vers le système des médiatisations.

Une fois que la Bavière a eu donné le signal de la résistance à l’hégémonie prussienne, la Saxe et le Hanovre l’ont suivie, oubliant peu à peu la ligue des trois rois. La Saxe a déclaré qu’elle n’avait pas eu l’intention, en signant le pacte des trois rois, de violenter le consentement des autres états allemands, et qu’il fallait attendre ce consentement. Le Hanovre, de son côté, a dit qu’il ne pouvait prendre part aux mesures proposées par la Prusse pour l’élection d’un parlement germanique avant d’avoir le consentement des autres états allemands.

Pendant que les petits états de l’Allemagne prenaient à l’égard de la Prusse cette attitude froide et réservée, que faisaient l’Autriche et la Prusse ? Nous sommes forcés ici, quel que soit notre penchant déclaré pour la Prusse, de re-