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les évaluations de 1850, excédant qui dépasserait encore de 8 millions la différence à couvrir entre les recettes et les dépenses ; mais il ne faut pas espérer, quelles que soient d’une part la sagesse et la fermeté du gouvernement, de l’autre l’empressement de la population vers le travail et vers les idées d’ordre, que la France, par un seul effort de sa volonté, puisse immédiatement, sous le régime républicain, remonter au point culminant de la prospérité qui s’était développée sous le régime monarchique. C’est surtout après les révolutions que le temps devient l’élément nécessaire du progrès.

La politique en matière de finances consiste, non pas à créer ou à trouver une matière imposable, mais à faire produire aux impôts existans et éprouvés tout ce qu’ils peuvent produire. Quand On n’est pas le maître de donner aux intérêts cette sécurité complète qui est le principe impulsif de la production et qui développe par conséquent les consommations sur lesquelles l’impôt lève tribut, il faut du moins rechercher si, dans le domaine que l’impôt embrasse, rien n’échappe à son action.

Cette recherche a conduit M. le ministre des finances à proposer de nouvelles taxes, qui sont destinées à étendre l’action de l’enregistrement et celle du timbre. Le résultat serait un produit de 18 millions. Ce chiffre ne me parait représenter ni ce qui est désirable ni ce qui est possible. Pourquoi ne pas frapper d’un timbre proportionnel, à raison de 1 pour 100 du revenu, les titres de rente ? Pourquoi ne pas soumettre au timbre les titres de pension, les diplômes, les brevets, tous les extraits, en un mot, des actes dans lesquels intervient la puissance publique ? Il n’y a pas d’impôt meilleur ni plus susceptible d’être universalisé, pourvu qu’on le modère. Je crois qu’au lieu de 18 millions, on en tirerait aisément 30. Il me semble encore que M. le ministre des finances était mis en demeure, par les nécessités du trésor et par l’opinion publique, de rétablir le droit du timbre sur les journaux. Ce droit, s’il est trop élevé à 5 et 6 centimes, pourrait être réduit à 3 centimes. Même avec cette réduction, il rendrait très probablement, grace à l’extension qu’a prise la clientèle de la presse, une somme de 4 à 5 millions.

En présentant un projet de loi pour la révision du tarif des patentes, projet qui accroît les revenus publics de la chétive somme d’un million, M. le ministre des finances y comprend pour quelques centaines de milliers de francs les offices ministériels, dont chacun connaît l’importance même sous le rapport du revenu qu’en retirent les titulaires. Ce plan sera jugé dérisoire. Le taux de la patente doit être proportionné à la valeur de l’industrie que le patentable exerce. Qui voudrait prendre au sérieux une patente de 500 francs lorsqu’elle frappe un notaire de la capitale ou un agent de change à qui sa charge rapporte 80 à 100,000 francs par an ? Les possesseurs d’office comprennent bien que l’impôt continuera dans leurs mains une sorte de propriété qui