Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 4.djvu/467

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pour compléter à grands traits cette comparaison entre les dépenses de la France et celles de l’Angleterre, il faudrait porter en ligne de compte le budget des routes ainsi que des chemins vicinaux, et celui de la bienfaisance publique.

En France ; la dépense d’entretien pour les routes tant nationales que départementales, et pour les chemins vicinaux, n’est guère inférieur à 60 millions de francs[1]. En Angleterre, la taxe des grands chemins (highway rate) et les sommes dépensées sur les routes à barrière (turnpike’s trust’s expenditure), en 1840 pour l’Angleterre et le pays de Galles seulement, s’élevaient à 2,829,045 livres sterling, plus de 71 millions de francs[2]. Seize millions d’hommes, de l’autre côté de la Manche, consacraient annuellement à l’entretien de leurs routes 71 millions, pendant qu’une dépense de 60 millions à peine était appliquée de ce côté aux routes parcourues par 36 millions d’hommes. Y a-t-il lieu de s’étonner, après l’inspection de ces chiffres, de la magnificence de la viabilité en Angleterre et de l’état de dégradation, ainsi que de misère, dans lequel, malgré des améliorations incontestables, on la retient encore chez nous ?

La bienfaisance publique a un budget assez médiocre en France ; Le total est de 73,220,718 francs, sur lesquels les hôpitaux et les hospices absorbent 53 millions et demi, et les bureaux de bienfaisance 13 millions et demi, sans compter le produit des dons volontaires. Dans la Grande-Bretagne, les sommes consacrées officiellement et par voie de taxe au soulagement des pauvres ont été, pour l’Angleterre proprement dite, en 1845, de 5,039,703 liv. sterl., pour l’Écosse, en 1847, de 544,334 liv. sterl., et, pour l’Irlande, de 1,823,036 liv. sterl. en 1848, total : 7,407,073 liv. sterl., environ 187 millions de francs, à quoi l’on peut ajouter la subvention de 297,189 liv. sterl. (7,504,011 fr.) que fournit le gouvernement aux institutions charitables, et le revenu des établissemens charitables, qui est d’à peu près 20 millions de francs.

Le budget officiel de la bienfaisance publique s’élève donc à 215 millions de francs pour les trois royaumes. À quel prix ? Au prix de la taxe des pauvres, qui devient, quoi qu’on fasse, un véritable supplément aux salaires, et qui démoralise peut-être autant qu’elle secourt. Je ne souhaite pas qu’on l’importe jamais en France ; le droit à l’assistance ne peut figurer, avec, quelque apparence de raison, que dans les lois d’un pays où les capitaux mobiliers ainsi que la propriété foncière demeurent le partage du très petit nombre et portent encore le stigmate

  1. Routes nationales : 31,500,000 fr. Routes départementales : 3,280,000 fr. Chemins vicinaux : 2,174,000 fr. Sans compter les crédits de 7,500,000 fr. pour lacunes de routes, et routes nouvelles en Corse.
  2. Flighway rate (1842) : 1,169,891 liv. sterl. Turnpike’s trust (1840) : 1,659,154 liv. sterl.