Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 4.djvu/394

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jours est décidément une tâche au-dessus des forces humaines. À la place de l’Université, nous serions charmé d’être déchargé d’un si périlleux monopole.

Nous ne reprocherons donc pas, à Dieu ne plaise, au nouveau projet de loi de briser le monopole universitaire. Pour tout dire, nous eussions mieux aimé que, profitant de l’occasion, on arrivât du premier coup à une solution plus hardie et plus complète. Comme quelques-uns des amis de M. de Falloux le lui ont fait sentir sans ménagement, nous craignons qu’il n’y ait dans sa loi aberrations de principes qui seraient visibles dans ses conséquences. Nous craignons qu’elle ne laisse subsister entre l’enseignement libre et l’Université trop de points de contact, qui pourraient devenir autant d’occasions de conflits ; mais nous savons parfaitement à quels embarras le consciencieux ministre avait eu affaire ; nous savons avec quelles difficultés s’opèrent un accord entre des opinions long-temps hostiles. Ces difficultés sont les mêmes qui rendaient, dans ces derniers jours, les questions religieuses si pénibles au gouvernement déchu. On ne lui en tenait pas compte alors : il faut s’arranger avec elles aujourd’hui. Prenons cet heureux accord tel qu’il est et pendant qu’il existe (si tant est qu’il existe encore), et craignons même de le troubler en soumettant ses conditions à un examen trop approfondi.

Ce que nous nous proposons de faire ici par conséquent, ce n’est nullement une discussion détaillée de la loi, en ce moment soumise à l’assemblée nationale. Nous prenons, au contraire, cette loi pour point de départ et comme accordée. En l’envisageant, nous y trouvons une part considérable faite encore à l’action de l’état en matière d’éducation d’une part, l’Université y est maintenue ; un enseignement complet continue à être donné au nom du gouvernement. D’autre part, au-dessus de l’Université comme des institutions libres, un vaste conseil formé, par la voie d’une élection spontanée, dans le sein des plus grands corps de l’état, est destiné à veiller à la fois sur l’enseignement officiel et sur l’enseignement privé. À en juger par le soin avec lequel l’exposé des motifs et le rapport même de la commission s’étendent sur la composition de ce conseil, c’est l’objet de la prédilection des auteurs de la loi nouvelle. On lui suppose donc beaucoup de pouvoir ; un grand effet en est attendu. Enfin le projet de loi maintient les examens et les grades en vigueur dans le système actuel d’éducation. Quels que soient les juges de ces examens et les distributeurs de ces grades, la seule existence d’une série d’épreuves nécessaire pour l’entrée des carrières libérales, épreuves dont le programme émanera indubitablement d’une autorité supérieure, donne encore à l’état un immense moyen d’agir sur l’éducation de la jeunesse. En un mot, si l’Université descend au second rang, l’instruction publique subsiste, et à bon droit,