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l’empire, le parti radical comprit bien que l’ambition prussienne le rendait maître du terrain et qu’il lui appartenait de faire la loi. Une quarantaine de voix étaient nécessaires pour rendre au parti Dahlmann et Welcker tout ce qu’il avait perdu huit jours auparavant ; il s’agissait de conclure un marché, et M. Henri Simon, à ce qu’on assure, en fut le négociateur habile. Le veto absolu, rejeté dans le premier projet de constitution, avait grande chance d’être rétabli ; le ministère Banderbourg l’avait officiellement demandé dans sa note du 27 février, et il le mandait secrètement chaque jour par l’organe de ses agens ; le veto fut définitivement, repoussé. Le suffrage universel et direct, consacré par la loi électorale, et été sans doute aussi l’objet de modifications importantes ; M. Henri Simon sut bien conserver cette précieuse conquête. Enfin, le conseil de l’empire (Reichsrath), ce conseil formé des princes des maisons souveraines et qui devait fournir un solide appui à l’autorité centrale, le parti républicain exigea qu’il fût supprimé, et le chapitre du Reichsrath disparut de la constitution. Le refus du veto, l’établissement du suffrage universel et direct, la suppression du conseil que le parti prussien ne craignit pas d’accorder pour obtenir l’élection de Frédéric-Guillaume. Qui gagnait le plus à ce singulier contrat ? Les radicaux avaient conquis des avantages considérables, puisqu’ils avaient d’avance désarmé le pouvoir et assuré les droits de l’esprit démocratique. En échange de ces concessions si graves, les amis de M. Dahlmann se payaient d’illusions et de l’ombre, ils avaient livré les conditions vitales de la société et les lois éternelles de l’ordre pour un mensonge d’unité dans un fantôme d’empire !


III

Le parlement avait décidé qu’une grande députation, composée du président de l’assemblée nationale et de 24 membres, se rendrait immédiatement à Berlin pour faire connaître au roi de Prusse l’élection du 28 mars. Arrivée à Berlin le 2 avril, la députation fut admise le jour suivant auprès de Frédéric-Guillaume bien en vain que les unitaires, aveuglés par les plus folles illusions, jouissaient à Francfort du résultat de leur conduite et se complaisaient déjà dans l’admiration de leur chef-d’œuvre ; la réponse donnée au président de l’assemblée fut telle qu’on devait l’attendre et du caractère personnel du roi et de la politique de son ministère. Le roi ne refusa pas ouvertement ; il ajourna seulement sa décision jusqu’à l’heure où les cabinets de l’Allemagne, officiellement consultés, auraient exprimé leur avis. Frédéric-Guillaume IV ne voulait pas de l’empire aux conditions que lui