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de Lyon, et se chargeait de les terminer ; une compagnie entreprenait à ses frais le chemin de Lyon à Avignon. Ainsi dégagée d’obligations importantes, l’administration redoublait d’activité sur les chemins dont l’exécution lui restait confiée ; mais cette activité même imposait au trésor un lourd fardeau : privé, par un ajournement momentané, des réserves de l’amortissement, il faisait provisoirement supporter le poids de ses dépenses par la dette flottante. Cette situation provisoire ne pouvait plus s’aggraver sans danger : l’administration des finances dégagea le service de la trésorerie en négociant, avec l’autorisation législative, un emprunt de 250 millions[1]. Au milieu de la crise du commerce européen, lorsque la Banque de France, pour la première fois depuis bien des années, avait haussé le taux de ses escomptes, lorsque la banque d’Angleterre avait limité les siens, même en en relevant considérablement le taux, lorsqu’une baisse générale déprimait le cours de tous les fonds publics dans toutes les bourses de l’Europe, le gouvernement de juillet, encore en plein crédit trois mois avant sa chute, adjugea sans peine son emprunt un peu au-dessous de 4 p. 100. C’est le dernier acte financier de la monarchie. Il n’échappa point aux critiques de ceux qui la renversèrent depuis, et qui, après l’avoir remplacée, se sont trouvés très heureux d’obtenir, pour 5 francs de rente, exactement le même capital que la monarchie avait obtenu pour une rente de 3 francs.

Telle eût donc été la situation financière du dernier gouvernement, si elle eût pu être liquidée tout à coup au 1er janvier 1848 tous les découverts du service ordinaire étaient éteints, à une légère différence près, qui allait disparaître dans l’exercice suivant ; toutes les avances du service extraordinaire étaient couvertes par des ressources assurées, et déjà même en partie réalisées. Pourquoi donc M. le ministre des finances, dans l’exposé des motifs du budget de 1850, fait-il ressortir, à la date que nous venons d’indiquer, un découvert de 441 millions imputable aux travaux publics ? Pourquoi s’autorise-t-il de cette circonstance pour reporter en partie sur le dernier gouvernement la responsabilité de la situation à laquelle il est obligé de faire face avec tant d’efforts et au prix de tant de sacrifices ?

Cette allégation nous a jeté dans un pénible surprise. Qu’est-ce donc qu’un découvert ? n’est-ce pas une dépense faite sans une ressource correspondante, une avance sans gage, qui doit être supportée par la dette flottante jusqu’à ce qu’il soit créé une ressource pour la couvrir ? S’il en est ainsi, le service des travaux extraordinaires n’a laissé, au 1er janvier 1848, aucun découvert à la charge du trésor. M. le ministre des finances additionne avec soin toutes les dépenses de ce service ; mais il en oublie toutes les ressources. Il compte dans les

  1. Emprunt du 10 novembre 1847.