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La révolution de juillet a eu besoin de 521 millions de ressources extraordinaires[1], au prix de ce sacrifice, elle était fondée. La révolution de février a déjà beaucoup plus coûté au trésor, et son compte de premier établissement est loin d’être fermé ; mais que sont les pertes du trésor en comparaison de celles du pays ! Le crédit de l’état affaibli ses recettes plus affaiblies encore, ne nous révèlent que trop les souffrances publiques. La révolution de juillet n’imposa pas au pays de tels sacrifices. La secousse qui avait renversé une dynastie n’ébranla que faiblement les fortunes. Le crédit public remonta rapidement à son niveau, et, dès le mois d’août 1832, un emprunt en 5 pour 100 se négociait presque au pair (98 50) ; c’est au milieu même de la crise de 1831 qu’a pris naissance la progression si long-temps soutenue qui a élevé de 20 millions chaque année les revenus indirects. Les affaires privées on n’en a pas encore perdu le souvenir, s’associèrent bientôt à la marche ascendante de la fortune publique.

Nous signalons cette différence sans en vouloir rechercher les causes : nous n’écrivons pas sur la politique, nous n’écrivons que sur les finances ; mais il nous était impossible de ne pas nous arrêter un moment sur ce trait distinctif de la révolution de juillet. En trois ans, elle avait fondé un gouvernement, elle avait équilibré son budget, et, secondé par la confiance publique, même durant ses années d’épreuve, elle avait fait pénétrer partout le sentiment de sa durée.

Ce fut alors qu’à l’abri de l’ordre et de la paix fermement établis le gouvernement entra dans la carrière des grands travaux publics, qu’il a parcourue jusqu’au terme de sa durée. Les travaux publics de l’empire, à quelques exceptions près, étaient les instrumens de ses guerres ou les monumens de ses victoires Les uns, après avoir frayé la voie à la conquête, étaient devenus, par un retour de la destinée, la propriété des peuples conquis ; les autres semblaient suivre la fortune de leur fondateur, et leurs colonnades abandonnées étaient l’emblème de sa gloire interrompue. Préoccupée de projets utiles et facilement indifférente à des monumens étrangers à son histoire, la restauration ajouta à peine quelques pierres à ces édifices inachevés. Elle reprit l’œuvre de la canalisation, artificielle de la France ; mais, soit que l’activité où les ressources aient manqué à ses travaux, elle laissa l’œuvre imparfaite :


  1. Produit d’aliénation de bois de l’état 114,297,276 fr.
    Trésor d’Alger et ressources diverses 60,760,551
    Retenue sur les traitemens 9,848,750
    30 cent, additionnels sur le principal des contributions directes 46,442,590
    Emprunt national au pair 20,438,900
    Emprunt en rentes 270,000,014
    TOTAL. 521,788,081 fr.