Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 3.djvu/565

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Le
Salon de 1849.


Fidèle reflet d’un siècle de doute et d’indifférence, l’art moderne est essentiellement éclectique. Une érudition générale, un goût tempéré qui agrée et apprécie tous les styles, une habileté courante de main qui les reproduit quelquefois heureusement, tel est le caractère que présentent, à notre époque, les arts plastiques, et en particulier la peinture. Il n’y a plus d’écoles, car qui dit école dit esprit d’exclusion systématique, et notre esthétique tolérante admet, au contraire, les expressions les plus diverses de la pensée. Depuis la défaite de l’école de David, la dernière qui ait eu ses traditions, son culte, ses réprobations, un travail s’est opéré presque identique à celui que tentèrent au IIIe siècle, dans le domaine de la science et de la philosophie, les Grecs d’Alexandrie. Comme eux, à bout de formules, nous nous sommes retournés vers le passé, nous avons évoqué successivement tous les systèmes et entrepris de les faire revivre d’abord, plus de les concilier et de nous les assimiler. Florentins, Vénitiens, Flamands, Espagnols, Français du XVIIe et du XVIIIe siècle, tous nos devanciers ont été interrogés ; à tous on a demandé leur secret, à tous on a pris quelque chose, et de ces débris on s’est efforcé de construire un édifice nouveau. Voilà tantôt vingt ans que beaucoup d’étude, de talent, de génie même, se dépensent à cette entreprise. Il est-il sorti une forme originale ? Après tant de retours sur les routes battues, a-t-on découvert une voie nouvelle ?