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les meilleures pour l’état. Voici en quoi elles consistaient : tout souscripteur pour 100 livres en argent devait recevoir une inscription de 100 livres 3 pour 100, une de 50 livres 4 pour 100, 5 shellings 6 deniers d’annuité pendant soixante-quinze ans, et les deux cinquièmes d’un billet de loterie. De cette façon, l’intérêt public fut seul consulté, et toute possibilité de faveur ou d’influence fut écartée. La charge de l’échiquier, par suite de cet emprunt, s’éleva à 7,875,000 francs par an. C’était à raison d’un peu plus de 5 pour 100.

En même temps, Pitt consolida pour 6,600,000 livres sterling ou 165 millions de francs de bons pour la marine et les vivres et de bons pour les dépenses de l’artillerie qui formaient une partie considérable de la dette flottante ; ce n’était encore là qu’un peu moins de la moitié de ces bons. Il était bien évident qu’il faudrait finir par consolider le tout ; mais c’était déjà beaucoup, au moment où l’on émettait un nouvel emprunt, de faire passer une pareille masse de titres dans la dette fondée. Pour payer l’intérêt du nouvel emprunt (315,000 livres), Pitt proposa purement et simplement d’établir de nouvelles taxes ; ces taxes portaient sur les chapeaux, les rubans, les gazes, les charbons, les chevaux, la toile, le calicot, les chandelle, les patentes des marchands au détail, les briques et tuiles, les permis de chasse, le papier et les fiacres. C’était, comme on voit, à l’exception des charbons et des tuiles, une série de taxes somptuaires. La seule qui souleva de sérieuses objections fut la taxe sur les charbons. Sur l’observation qu’elle pourrait être nuisible aux manufactures et oppressive pur le pauvre, Pitt l’abandonna et y substitua une taxe sur la vaisselle d’or et d’argent, sur le plomb exporté, les licences pour la vente de l’ale, les chevaux de course, la poste aux lettres, et il changea celle sur les rubans et la gaze en une sur la soie écrue. Il ne proposa pas moins de cent trente-trois résolutions, qui furent transformées en bills et passèrent sans grande difficulté. Tout le monde admira dans les débats, ainsi que dans l’immense exposé qui avait ouvert la discussion, les ressources d’esprit et de volonté du jeune chancelier de l’échiquier, et les espérances de l’Angleterre achevèrent de se fixer sur lui.

Telle fut en résumé, sous le rapport financier, cette session de 1784, la première d’une si longue et si éclatante carrière.

La suite répondit à ce début. Non content d’avoir obtenu du parlement des bills contre la contrebande, Pitt eut soin de tenir énergiquement la main à l’exécution des mesures adoptées. Au mois de janvier 1785, il fit brûler, le long des côtes, sans autre forme de procès, tous les bâtimens suspects de contrebande. Un certain genre de construction favorable à la marche rapide des navires et particulière aux contrebandiers était à peu près la seule indication qui servait à reconnaître les bâtimens à incendier. Cette hardie mesure fut exécuté en présence