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analogue à celui qui frappait le savant académicien. L’accroissement des exportations de vins depuis une vingtaine d’année, à chacune des améliorations qu’ont reçues le bassin de Port-Vendres et les routes qui convergent vers ses quais. À mesure que ces vins ont été plus connus, ils ont été plus demandés ; ils remplaceront un jour en Amérique ceux qu’y versent les Deux-Siciles, et déjà des indices certains découvrent, l’étendue du marché qui leur est promis. Dans les expédition par le cabotage, les quatorze quinzièmes, sont destinés à l’Océan, et au premier rang des débouchés étrangers figurent la Hollande, les États-Unis et le Brésil. Or, la qualité, des vins correspond assez exactement aux distances auxquelles ils sont transportés. On peut, sans présomption, compter que l’exportation des vins du Roussillon atteindra graduellement un million d’hectolitres. Le pays ne sera point embarrassé de les produire. À côté des 38,450 hectares qu’occupe déjà la culture de la vigne, une étendue au moins égale de terres incultes est parfaitement propre à la recevoir, et sans chercher plus loin que les cantons de Rivesaltes et d’Argelès, où les meilleurs vins de la contrée se recueillent à côté des meilleurs points d’embarquement, plus de la moitié de 26,407 hectares de friches n’y attendent, pour se convertir en vignobles, que des bras et des capitaux.

Le Roussillon donne des blés du poids de 80 à 84 kilogrammes par hectolitre.[1], égaux en finesse à ceux de la Sardaigne et de la Sicile. Convertis en farines d’armement, ils bravent les feux de la zone torride aussi bien que l’humidité des régions polaires, et la navigation, qui, suivant les vicissitudes des saisons, les remplacerait avec avantage dans la consommation locale par les blés communs du Poitou, de la Bretagne et du Levant, en revendiquera quelque jour la disposition. Il ne faut, pour opérer cette révolution, que l’établissement dans le pays d’une minoterie telle qu’en possède déjà plusieurs le département des Bouches-du-Rhône. Arrêté aux brusques escarpemens entre lesquels la plaine est resserrée, le sol arable ne peut malheureusement pas s’élargir comme le vignoble : la charrue n’a de conquêtes à faire que sur les étangs salés qui bordent la côte, et l’avantage en consisterait bien moins dans la valeur de la surface ajoutée au domaine des campagnes adjacentes. Sur tout le territoire atteint par les miasmes qui s’exhalent des étangs, la fièvre dévore l’enfance, exténue l’âge mûr et accélère l’invasion de la vieillesse ; la culture languit sous des bras énervés, et les terres les plus riches

  1. . On sait que la pesanteur spécifique du blé est la mesure exacte de sa qualité. Le poids des bons blés admis dans les manutentions de la guerre est de 75 kilogrammes par hectolitre, et celui de 84 n’est presque jamais dépassé.