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REVUE. — CHRONIQUE.

libéral que le comporte l’état des choses à Rome. Ces principes étaient : 1° l’admission des laïques à tous les emplois 2° une administration municipale émanant d’élections sincères et investie d’attributions fort larges ; 3° une administration provinciale issue des municipalités ; 4° une administration centrale siégeant à Rome et composée des délégués des administrations provinciales. Voilà les principes que l’Europe monarchique adoptait en 1832, et ces institutions nouvelles, que l’Europe voulait introduire à Rome pour remédier aux abus reconnus du gouvernement pontifical, elles auraient été mises sous la garantie de l’Europe, de manière qu’elles auraient été indépendantes du pouvoir pontifical, et qu’elles n’auraient pas pu être abolies par un motu proprio.

Cette grande et solennelle constitution du gouvernement pontifical, qui n’a pas pu se faire en 1832, nous espérons qu’elle pourra se faire en 1849, sous les auspices de la France. Ç’a été peut-être un des reproches à faire à notre occupation d’Ancône d’avoir été inutile au libéralisme romain. Elle a servi l’influence de la France en Italie ; elle n’a pas amélioré le gouvernement pontifical. Ce qui ne s’est pas fait doit se faire, et d’autant plus aisément qu’au lieu l’avoir un pontife qui résistait à l’impulsion libérale, nous avons aujourd’hui un pontife qui a donné cette impulsion à l’Italie. Soit que nous restions à Rome ou à Civita-Vecchia, nous devons, comme arbitres et comme conciliateurs décisifs, travailler à la grande et opportune conciliation du principe laïque et du principe ecclésiastique dans l’administration des États Romains.

Nous voulons introduire et soutenir à Rome une politique libérale. À Turin, cette politique existe, et nous n’avons qu’à l’empêcher de succomber.

Et d’abord nous ne devons pas oublier que le Piémont est devenu un état constitutionnel avant le 24 février. On ne peut donc pas mettre la constitution piémontaise au compte de la révolution française. La monarchie de juillet s’applaudissait de voir le Piémont entrer dans la famille des états constitutionnels, et elle avait raison. Il est bon pour la France de n’être pas sur le continent le seul pays qui ait une constitution libérale. Le Piémont est, dit-on, une barrière que l’Europe a mise entre l’Autriche et la France. La barrière est plus forte encore quand le Piémont devient un état libéral, car alors entre l’Autriche et le Piémont l’incompatibilité devient plus sensible que jamais. Or, le 8 février 1848, le Piémont a reçu des mains de son roi une constitution. À ce moment, point de guerre encore entre l’Autriche et le Piémont. La Lombardie et la Vénétie n avaient pas encore fait au Piémont leur appel fatal, fatal, disons-nous, parce que il n’a pas été soutenu. Et puisque la constitution piémontaise est antérieure à la guerre de Lombardie, pourquoi cette constitution aurait-elle été battue à Novarre ? La défaite de Novarre a dû faire perdre au Piémont tout ce que le Piémont aurait pu gagner, s’il avait été vainqueur. Elle lui a fait perdre la couronne de fer. Nous ne réclamons pas contre les arrêts du sort ; mais nous demandons à borner ces arrêts à leur véritable texte. On ne combattait pas à Novarre pour savoir si le Piémont aurait, oui ou non, une constitution ; on combattait pour savoir si le roi de Piémont serait roi des Lombards. Pourquoi donc le Piémont aurait-il perdu sa constitution à Novarre, puisqu’il ne l’avait pas mise au jeu ?

Quand nous parlons ainsi, nous allons droit au fond des difficultés que l’Autriche suscite au Piémont. L’Autriche avait demandé d’abord au Piémont