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universelle tenait au principe même qui avait fait la couronne élective. On n’avait point voulu fixer la souveraineté dans l’une des trois nations de l’alliance au préjudice des deux autres. Quand la réunion de la principauté à l’empire eut supprimé toute jalousie à ce sujet, le reste du système fut maintenu. Il eût fallu, pour être fidèle au nouveau principe d’autorité qu’on intronisait, abolir le système d’élection des fonctionnaires, et s’en remettre à l’intérêt même du souverain pour la répartition équitable des emplois entre les différentes populations. Quand une constitution est impraticable, on la laisse de côté, sans trop chercher de prétextes pour la suspendre. La meilleure raison en pareil cas, la raison souveraine, c’est qu’il faut vivre avant tout. Alors peu importe qu’on ait, dans la constitution, exagéré toutes les libertés jusqu’à la licence, mis en regard les uns des autres des droits incompatibles, proclamé des principes avec lesquels tout gouvernement est impossible. On supprime la constitution, et, au lieu de la lutte et des fatigues glorieuses des gouvernemens libres et modérés, on a l’autorité sans contrôle et sans limite. Les anciens avaient un mot poétique pour désigner ce sommeil de la constitution : « Il est des temps, disaient-ils, ou il faut voiler l’image des dieux. » C’était leur état de siége. Nous verrons que l’usage de cet extrême remède est fréquent dans l’histoire transylvaine. Ainsi la diète doit être assemblée chaque année ; le diplôme Léopold et les articles de la diète de 1791 contiennent à cet égard les dispositions les plus formelles. On ne citerait pas une période de dix années où cette convocation ait eu lieu avec quelque régularité. On peut dire que la tenue annuelle des diètes est l’exception. La constitution a quelquefois dormi d’un sommeil aussi long que celui d’Épiménide.


II

Dans ces dernières années cependant, des diètes plus fréquentes ont été convoquées. Une politique libérale avait prévalu par les conseils de l’archiduc palatin. Il en était résulté un rapprochement marqué entre les autorités supérieures et la noblesse. Celle-ci cherchait depuis long-temps à transporter au milieu du pays hongrois, à Clausenbourg, le mouvement politique et l’administration ; elle voulait faire de cette ville la vraie capitale et le centre de la principauté. C’était là qu’elle aimait à se réunir et à étaler son luxe pendant la tenue des diètes. Le jour de la convocation des états, la vieille ville magyare change complètement d’aspect. La régence abandonne Hermanstadt et vient résider auprès de la diète ; la noblesse, jusque-là dispersée dans ses châteaux, s’établit à la ville. Les députés n’ont pas besoin de l’amende infligée aux retardataires pour être exacts car chacun a un motif ou un prétexte pour venir. Les grands propriétaires non députés sont fonctionnaires