dire assez combien à Saint-Léonard et à Eisenach la mort du maréchal a été pleurée. Tous les membres de la famille royale ont écrit à la famille du maréchal pour lui témoigner leurs vifs, et profonds regrets. « Et croyez bien, disait et le duc d’Aumale, que ce n’est pas pour moi la moindre amertume de l’exil de n’avoir pas pu serrer une dernière fois la main de mon vieux général. »
Il est juste que celui qui sait si bien se souvenir ne soit pas oublié, et nous avons vu avec plaisir le témoignage de bonne mémoire que l’Algérie a donné à M. le duc d’Aumale aux dernières élections. 2,500 suffrages sont venus spontanément se réunir sur le nom de l’ancien gouverneur-général de l’Algérie, et lui montrer que, dans un pays où il y a tant faire, le souvenir de celui qui avait déjà beaucoup fait et bien fait ne s’est pas éteint dans le tumulte des révolutions. Nous ne voulons pas ici discuter l’éligibilité du citoyen Henri d’Orléans, comme a dit le citoyen Frichon dans son rapport sur les élections de l’Algérie. Nous laissons de côté le point de vue légal pour ne nous occuper que du point de vue moral. Or, il est de bonne morale que les services que M. le duc d’Aumale a rendus à l’Algérie ne soient point oubliés. Ce ne sont pas seulement les électeurs de l’Algérie qui en gardent la mémoire ; nous lisions dernièrement un excellent rapport adressé à M. le ministre de l’instruction publique et des cultes par M. Ferdinand Barrot, au nom de la commission chargée de rechercher les moyens de propager en Algérie la connaissance de la langue arabe parmi les Européens et celle de la langue française parmi les indigènes, et nous y voyions avec plaisir que M. Ferdinand Barrot aimait à rendre justice aux vues judicieuses que le jeune prince avait montrées pendant son gouvernement de l’Algérie.
« La politique la plus prudente et la plus libérale, dit M. Ferdinand Barrot, nous conseille la restauration de l’enseignement musulman, et on disait avec raison au sein de la commission qu’au point de vue politique, l’organisation d’une bonne école valait mieux pour la pacification de l’Algérie que deux bataillons. Nous avons trouvé ces pensées si justes et si élevées dans un rapport très remarquable que M. le duc d’Aumale adressait au gouvernement le 15 janvier 1848. « De toutes les sommes, disait-il, que nous dépenserons en Algérie pour asseoir notre domination, il n’en est pas qui puissent recevoir une destination plus utile que celles consacrées à relever la position intellectuelle du peuple arabe. Par cette restauration de l’enseignement musulman, ajoutait-il, nous aurons atteint deux buts principaux : nous aurons marqué dans notre gouvernement une place aux hommes de parole et de pensée, les véritables maîtres des intelligences et des consciences. Nous aurons rempli le devoir que la Providence nous impose en nous confiant les destinées du peuple arabe. Satisfaire les besoins moraux et intellectuels des populations par le bienfait de l’instruction est pour le gouvernement acquitter une dette envers les peuples. » Nous ne pouvons qu’applaudir, monsieur le ministre, à l’expression si sage et si digne d’une noble et utile pensée. »
L’Algérie n’est pas le seul lieu qui, dans les élections, se soit souvenu qu’il y a dans l’ancienne famille royale des jeunes gens qui ont noblement servi la France. Le département de la Haute-Marne avait aussi mis sur la liste des candidats M. le prince de Joinville. Et qu’on ne se hâte pas, voyant la mention que nous faisons de ces candidatures, de nous accuser d’être des conspirateurs.