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la guerre civile et la guerre étrangère, les corps francs des républicains faisant irruption dans le duché de Bade, les Tchèques de Bohême décidés à faire triompher l’élément slave en Autriche et protestant contre le parlement de Francfort, enfin les hostilités ouvertes entre le Danemark et la Prusse au sujet du Schleswig. Tandis que les cinquante écrasaient les républicains dans le duché de Bade (fin avril), en Prusse ils poussaient le général Wrangel contre les Danois, afin de courtiser les passions populaires, et lui donnaient tout l’appui dont il avait besoin pour désobéir aux ordres de Frédéric-Guillaume. D’un autre côté, si les Allemands du Schleswig voulaient, malgré le Danemark, faire partie de la confédération germanique et siéger au parlement de Francfort, les Tchèques de la Bohême et de la Moravie ne cachaient plus leur désir d’enlever l’Autriche à l’Allemagne et de l’obliger à fonder un empire slave. Point d’élections pour Francfort ! c’était le cri de l’insurrection en Moravie et en Bohême. Le comité des cinquante rédigeait proclamations sur proclamations ; il fallut bientôt envoyer des délégués. M, de Wachter, M. Kuranda, M. Schilling, se rendirent à Prague. Ils trouvèrent la ville en feu ; les Slaves étaient les maîtres, et tout ce qui s’intéressait à la cause allemande était sous le coup de la terreur. Les délégués essayèrent de parler dans les clubs ; vains efforts ! Au seul nom du parlement germanique, les Tchèques poussaient des cris de fureur et levaient leurs bâtons. M. Kuranda et M. de Wachter revinrent à Francfort, abattus et désespérés. Que faire ? Implorer le secours de l’Autriche en faveur des Allemands de Prague ? M. de Wachter le demandait expressément dans la séance du 3 mai, après avoir raconté les tristes aventures de l’ambassade. Il est trop évident que c’était demander l’impossible. Effrayée de la formation révolutionnaire du parlement, effrayée surtout des projets de l’assemblée nationale, l’Autriche, même après les journées de mars, pouvait-elle se prêter complaisamment à l’œuvre de l’unité germanique ? M. de Metternich, du fond de son exil, gouvernait encore à Vienne ; l’Autriche, pendant tout le mois de mai, se servit des Tchèques contre les prétentions de Francfort, de même qu’elle exploitait contre les Magyars les longues rancunes de la Croatie. Il fallut que l’insurrection des Tchèques devînt tout-à-fait terrible et menaçât même l’Autriche, pour que le prince Windischgraetz pût bombarder Prague. Cette extrémité ne devait se produire qu’à la fin de juin, et l’on était alors au commencement de mai. On voit quels obstacles se dressaient devant le comité des cinquante !

Y avait-il au moins une suffisante harmonie entre les cinquante et la diète ? La diète, nous l’avons vu, s’était soumise, et les événemens, d’ailleurs, l’avaient transformée dans un sens libéral. Telle qu’elle était toutefois, elle représentait les gouverne mens ; on ne s’étonnera pas qu’elle ait épié l’occasion de revendiquer les droits des souverains et de diminuer l’autorité dictatoriale dont on avait investi d’avance la