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l’heure de la délivrance s’éloignant, le découragement pouvait paralyser l’insurrection. On dut donc se décider pour l’offensive, et l’offensive libératrice de Milan. La marche par Buffalora était désignée dès lors comme la manœuvre la plus favorable pour l’accomplissement de ce projet, d’autant plus qu’elle permettait en même temps de tenir une attitude défensive. D’ailleurs, de grandes forces, assurait-on, étaient concentrées à Magenta et à Sadriano, et on apprenait que les Autrichiens avaient rappelé toutes les garnisons de la Lombardie et dix mille hommes du duché de Parme, ne laissant que deux à trois mille hommes dans le château de Milan et de très faibles détachemens dans les autres villes. L’armée autrichienne devait présenter en ligne de soixante à soixante-dix mille hommes. Il importait donc de faciliter l’insurrection lombarde, et la marche de l’armée piémontaise pouvait en hâter l’explosion.

Concentrée sur le Tessin, le 20 mars, l’armée piémontaise devait présenter un effectif de six divisions, d’une force réelle de neuf mille combattans l’une dans l’autre, plus la brigade commandée par le général Solaroli, plus encore huit quatrièmes bataillons[1] et deux bataillons de bersaglieri[2]. La brigade Solaroli comptait près de 4,000 hommes, les huit quatrièmes bataillons 4,800 combattans, les deux bataillons de bersaglieri environ 1,200, ce qui donnait une force totale de 60 à 66,000 hommes, dont environ 4,000 hommes de cavalerie, et disposant de 132 pièces d’artillerie. Les forces combattantes qui devaient se rencontrer dans une première bataille étaient donc égales ou presque égales dans les deux camps.

L’armistice avant été rompu par les ministres piémontais, sans avis préalable et malgré l’opposition du général Chrzanowski, on n’avait pas eu le temps de rappeler la division du général La Marmora, cantonnée à Sarzana. Cette division dut se porter sur Parme et Plaisance, prête à secourir la brigade d’avant-garde laissée à Castel-San-Giovanni pour contenir la garnison autrichienne ; ces deux derniers corps formaient un effectif de 12,000 hommes, dont 300 cavaliers, et disposant de 24 bouches à feu. On voit que le total de l’armée piémontaise ne dépassait pas 78,000 combattans. Les 120,000 hommes dont a parlé le ministère n’ont jamais existé que sur le papier ; pour arriver à ce chiffre, on comptait la partie de la garde nationale qui devait être mobilisée, et les dix mille malades militaires renfermés dans les hôpitaux au jour de la dénonciation de l’armistice, ainsi que les garnisons

  1. Les quatrièmes bataillons étaient les bataillons hors-cadre.
  2. Le corps des bersaglieri correspond exactement à ce que nous appelons dans notre armée les chasseurs de Vincennes.