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moins qu’il sera discret ! (Elle s’assied.) Dans quel abîme me voilà ! Que faire ? La reine va venir… Lui parler, me livrer à elle !… je lui en ai déjà trop dit. Elle a beau me sourire, je sens toujours ce cœur de glace… Si du moins ce n’était que le roi de Navarre, j’oserais lui tout dire ; mais ce procès… la voix me manquera… Et pourtant le temps presse ! demain !… demain tout peut être fini… Ah ! que faire ! malheureuse ! (Apercevant la reine-mère qui ouvre la porte.) La voici !… je n’oserai jamais !



Scène IX.

LA REINE, LA REINE-MÈRE.
LA REINE-MÈRE.

Bonjour, belle chasseresse ! (Elle l’embrasse.) Laissez-moi voir… C’est l’habit que votre sœur vous envoie de Madrid… il vous sied à ravir !… Je viens de rencontrer votre cousin de Navarre, tout radieux de vous faire compagnie. Il en augure bien pour son frère, et, entre nous, il a raison. Je sais de bonne source qu’enfin les commissaires suivent l’avis du chancelier. On renvoie tout au parlement. À la bonne heure, c’est obéir aux lois du royaume, ce sera de la justice. Si le prince est coupable, ni vous ni moi ne voulons le sauver ; il faut qu’il soit puni ; seulement il le sera… Mais qu’avez-vous ?

LA REINE.

Rien, ma mère… je pense comme vous, il faut faire justice.

LA REINE-MÈRE.

Non, vous me cachez quelque chose.

LA REINE.

Ne me faites pas parler… je vous en prie.

LA REINE-MÈRE.

Quel mystère ?…

LA REINE.

Le roi…

LA REINE-MÈRE.

Vous a-t-il défendu de vous ouvrir à moi ?

LA REINE.

Non, mais…

LA REINE-MÈRE.

Eh bien, dites… ma fille ! dites donc !

LA REINE.

Le chancelier s’abuse, ma mère ; ce n’est pas au parlement qu’on veut envoyer… le prince, c’est…

LA REINE-MÈRE.

Parlez !