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de Jean est d’une belle couleur mélodique, ainsi que le passage suivant :

Et la couronne
Que le ciel donne
A ses élus, à ses vengeurs !


Quant à l’ensemble qui forme la conclusion du quatuor, il est plein de vigueur. Ce beau quatuor produirait peut-être un effet plus saisissant si les parties vives qui le composent étaient plus rapprochées les unes des autres, et si des récitatifs qui ne sont pas absolument nécessaires à l’éclaircissement de la situation ne venaient de temps à autre refroidir l’intérêt.

Le troisième acte présente le tableau le plus riant de la pièce. Il commence pourtant par un chœur vigoureux que chantent les soldats anabaptistes, traînant après eux de pauvres prisonniers qu’ils immoleraient à leur fureur, si Zacharie, leur chef, ne survenait à propos. L’air qu’il dit pour célébrer la victoire de son parti est tout-à-fait dans la manière de Haendel, c’est-à-dire d’une mélodie flottante et sonore. Quant à la musique du ballet, elle est ravissante d’un bout à l’autre, ainsi que le joli chœur que chantent encore les anabaptistes pendant qu’on voit filer à l’horizon les patineurs agiles. C’est aussi dans le troisième acte que se trouve un trio pour ténor et deux voix de basse qui est un chef-d’œuvre d’invention et de facture, et, selon nous, le morceau le plus complet de la partition. La situation qui donne lieu à ce trio est des plus piquantes : le comte d’Oberthal, qui a été surpris rôdant autour du camp, est conduit sous la tente des chefs anabaptistes, où se trouvent Zacharie et Jonas. Il fait nuit, ce qui engage Oberthal, pour sauver sa vie, à se faire passer pour un néophyte qui vient embrasser la cause de l’insurrection. C’est alors que Jonas et Zacharie, assis autour d’une table couverte de brocs remplis de vin, se mettent à expliquer au comte d’Oberthal le catéchisme de la nouvelle religion. À chacune de ces étranges maximes, le comte d’Oberthal répond en frémissant : Je le jure. Cette morale, que nos socialistes modernes n’auraient pas désavouée, est traitée par le compositeur avec une habileté et un bonheur incroyables. L’ensemble qui suit est admirable de vérité et de rondeur soldatesque. Lorsque Jonas, ennuyé de boire ainsi dans l’obscurité, tire un briquet de sa poche qu’il se met à battre en chantant :

La flamme pétille,


l’orchestre reproduit l’effet du pétillement par de charmantes imitations où l’on reconnaît l’esprit et la science de M. Meyerbeer. À ce morceau, digne des plus grands éloges, succède le finale du troisième acte, qui renferme également des choses remarquables. Le récitatif dans lequel le faux prophète, reprochant à ses soldats leur insubordination,