Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 2.djvu/460

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
394
REVUE DES DEUX MONDES.
LE PRINCE DE CONDÉ.

L’autre ?… Comme vous voudrez ; il importe assez peu maintenant.

BOUCHARD.

Maintenant ? pourquoi donc, monseigneur ?…

LE PRINCE DE CONDÉ.

Eh bien ! tenez, (Il lui donne la lettre ouverte.) la voici : vous direz au roi que je l’ai lue ; qu’elle me semble digne de sérieuses réflexions. Ces paroles de la reine-mère ont bien leur poids ; ce sont des paroles écrites. Dites-lui de ne point les perdre : s’il persistait dans son dessein, elles seraient d’un grand secours pour lui, et, qui sait ? pour moi-même.

BOUCHARD.

Pour vous, monseigneur ?

LE PRINCE DE CONDÉ.

Oui, pour moi. Croyez-vous donc, Bouchard, que je pourrais jamais laisser mon frère s’exposer seul à un tel danger ?

BOUCHARD, repliant la lettre qu’il a parcourue.

Ah ! monseigneur, je vous reconnais bien là ! Mais, au nom du ciel ! gardez-la cette lettre ; je vous en prie, gardez-la.

LE PRINCE DE CONDÉ.

fEt pourquoi ?

BOUCHARD.

Je viens d’en lire assez : si je la montre au roi, tout est dit.

LE PRINCE DE CONDÉ.

Qu’est-ce donc ?

BOUCHARD.

Le nom seul de la reine Marie, il y a de quoi nous faire partir sur l’heure,

LE PRINCE DE CONDÉ.

Vous voulez rire. Comment, mon frère ?…

BOUCHARD.

Serait-il possible que monseigneur ne s’en fût jamais aperçu ?

LE PRINCE DE CONDÉ.

Non, vraiment.

BOUCHARD.

Eh bien ! monseigneur peut m’en croire.

LE PRINCE DE CONDÉ.

Mais sa barbe grisonne.

BOUCHARD.

Est-ce un Caton pour cela ?

LE PRINCE DE CONDÉ.

Non, mais ce n’est point un fou, et jamais pareille démence… (À part.)