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Le même succès a été récemment obtenu par l’escadre de la Méditerranée. Deux de nos vaisseaux ont lutté d’agilité avec l’escadre anglaise et l’ont complètement distancée. L’amiral Parker a eu la loyauté de reconnaître, dans une lettre écrite à M. l’amiral Baudin, les qualités nautiques de nos vaisseaux et la prestesse de manœuvre de nos marins.


Personnel.

À quelles causes attribuer ces résultats, sinon à la composition du corps des officiers de marine et au passage d’un grand nombre d’entre eux sur l’escadre d’évolutions ? À quelles institutions en rapporter l’honneur, sinon au régime de l’inscription fondé par Colbert et perfectionné dans une tradition de deux siècles ?

Voilà des avantages qu’il serait bien imprudent de compromettre, et cependant nous entendons tous les jours discuter l’inscription maritime ; tous les jours nous entendons répéter : Les cadres d’officiers sont trop nombreux, il faut les réduire ; il y a trop d’officiers-généraux, trop d’officiers supérieurs, trop d’officiers de tous grades.

En 1846, M. Thiers, avec sa merveilleuse facilité de tout retenir et de tout dire, évoquant à la tribune les enseignemens de l’histoire maritime, s’écriait : Prenez garde ! vous accroissez le matériel de votre flotte et vous ne pensez pas à augmenter le nombre de vos officiers. La guerre vous surprendra n’ayant pour armer vos vaisseaux que des cadres insuffisans. — M. Thiers, qui a dirigé les affaires, qui sait jusqu’aux infinis détails tout ce qu’exige la guerre pour être faite avec honneur, portait son regard vers l’éventualité d’une guerre maritime. Ceux qui attaquent comme exagérée la composition des cadres ne regardent que les besoins de la paix. Est-ce agir sagement ? N’est-ce pas, au contraire, aller à l’encontre de tous les principes qui président à la conduite des affaires militaires ? Voyez l’armée de terre ; n’est-il pas universellement reconnu que ce qu’il importe surtout de lui conserver pendant la paix, ce sont les cadres ? Un projet de loi est soumis à l’assemblée nationale pour régler sur des bases nouvelles l’organisation de l’armée : le principe du maintien des cadres y est déclaré essentiel. Pourquoi ? Parce que le but final de l’entretien de l’armée, c’est la guerre. Comment n’en serait-il pas de même pour la marine ? Il ne s’agit pas seulement là de rompre les hommes à la discipline, à la manœuvre, à la marche, et de les guider au combat. Le simple enseigne de vaisseau, dès qu’il met le pied sur un navire, assume immédiatement sa part de responsabilité de la vie de tous ceux qui l’entourent et du salut du bâtiment. La paix des hommes n’impose pas aux élémens. À la mer, il faut lutter sans cesse ; tout peut être ennemi, les vents, la mer, la terre elle-même. Aussi des règles prévoyantes ont-elles voulu que le commandement et les postes qui en approchent