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quelques officiers et dont l’application généralisée serait d’un très utile effet pour la conservation des machines et de leurs chaudières.

C’est sur ces bases que nous avons préparé un état d’armement minimum pendant la paix[1]. Nous voulons dire que, quelle que soit la situation de ses finances, la France, si elle veut mettre sa marine en état de pourvoir aux nécessités les plus pressantes du service public, doit entretenir ce minimum d’armement. Tant que ces nécessités ne seront pas réduites, l’armement ne saurait être lui-même réduit. Tel qu’il est calculé, il exigerait l’emploi de 186 bâtimens, dont 105 armés et 81 en réserve. 22,000 hommes seraient nécessaires à la formation des équipages. Tel qu’il est, il pourvoit à tous les services ordinaires. De plus, il donne à la France la disposition immédiate de 12 vaisseaux pour les éventualités de sa politique. Il permet de rendre un peu de vie au port de Brest que la force des choses a conduit à négliger trop long-temps. Par là même, il prépare les voies à l’armement sur le pied de guerre. 10 vaisseaux et 10 frégates à voiles, 15 frégates-vapeurs, entretenus en commission et distribués systématiquement entre les ports qui auraient à en faire emploi pour la guerre, porteraient avant six mois nos forces à un effectif déjà imposant.

Une bonne direction doublerait cette valeur. En temps de paix, il est bon que nos marins passent fréquemment le détroit de Gibraltar : leurs devanciers l’ont franchi plus d’une fois sous le canon anglais. Il serait d’un effet salutaire de conduire dans la Méditerranée les vaisseaux armés à Brest, de faire évoluer de concert les divisions des deux mers et d’exciter entre elles une puissante émulation. De plus, au lieu de laisser dépérir sur rade les vaisseaux en disponibilité, pourquoi ne les ferait-on pas passer à tour de rôle à l’état d’armement ? Il suffirait pour cela que le vaisseau armé versât au disponible le complément d’équipage dont la valeur est principalement dans le nombre. On aurait ainsi le moyen d’instruire, de former par la pratique d’excellens cadres de maistrance en même temps que de bons états-majors. L’activité qui en serait la conséquence donnerait à nos ports cette vie si nécessaire au moment où il faudrait faire la guerre et qu’on aurait grand’peine à réveiller si on la laissait trop long-temps s’assoupir.

En 1840, notre escadre de 20 vaisseaux, admirablement commandée, formée à la discipline et aux manœuvres par une navigation constante, a conquis un résultat qui doit être un encouragement. L’amiral anglais Napier a déclaré dans la chambre des communes que plus d’une fois il avait eu le chagrin de constater la supériorité d’organisation des vaisseaux français que conduisait le regrettable amiral Lalande.

  1. Voir aux annexes l’état A.