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REVUE DES DEUX MONDES.
LE CARDINAL DE LORRAINE, à part.

Tant pis, elle jouera plus serré.

LA REINE, haut.

Ma mère, avez-vous donc laissé le roi seul avec son cousin ?

LA REINE-MÈRE.

Oui, ma fille, et soupirant après vous plus que jamais, je pense.

LA REINE.

Je comprends et vais à son secours.

LA REINE-MÈRE, riant.

C’est un beau dévouement ! Que Dieu vous aide, ma fille !

(La reine sort.)



Scène XVII.

LA REINE-MÈRE, LE DUC DE GUISE, LE CARDINAL DE LORRAINE.


LA REINE-MÈRE, assise.

Vous ne vous asseyez pas, monsieur le duc ?… Et vous, monsieur le cardinal ?… (Après qu’ils sont assis.) Eh bien ! messieurs, pendant ce peu de jours que j’ai passés loin du roi, l’état de ses affaires a donc bien changé, qu’il ait fallu changer ainsi la façon de les conduire ? Je ne sais rien et ne veux rien savoir. Le roi m’a parlé d’avertissemens venus je ne sais d’où, d’un coup de main sur Lyon, d’une révolte en Dauphiné, de prises d’armes en d’autres lieux… qu’il ne m’a pas nommés…

LE CARDINAL DE LORRAINE.

Nous dirons tout à la reine… pour peu qu’elle le désire.

LA REINE-MÈRE.

Merci, monsieur le cardinal ; il faudrait remonter trop haut, et j’aurais trop de questions à faire, si je voulais apprendre tout ce que, depuis un an, on trouve bon de me cacher. Laissez-moi dans mon ignorance. Je veux croire, comme vous, que le gouvernement du royaume en ira mieux, qu’il prendra quelque chose de plus grand, de plus viril, si des pensées de femme ne s’y viennent plus mêler.

LE CARDINAL DE LORRAINE.

Quoi ! madame, vous supposez !…

LA REINE-MÈRE.

Dieu m’est témoin que les secrets d’état n’ont pas grand prix pour moi ; je ne gémirais pas des mystères qu’on me fait, si je n’avais la folie de croire que le cœur d’une mère voit plus clair aux choses qui regardent son enfant que l’esprit du plus docte conseiller. Mais n’en parlons