à souhait : non-seulement nous poursuivions notre voyage, mais, grâce à mes bons avis, notre escorte était devenue de plus en plus modeste. À tous les gentilshommes, huguenots et autres, qui se présentaient pour nous accompagner, les princes répondaient : Il ne faut donner ombrage ni au roi ni aux états ; nous ne voulons être forts que de notre innocence, ne compter que sur notre droit. Tant en Poitou qu’en Périgord, ils auraient pu ramasser ainsi quatre à cinq mille lances pour le moins, mais ils avaient tout refusé. C’était merveilleux, quand tout à coup sont survenus d’abord une maudite lettre du connétable, puis un message de Mme de Koye, des avertissemens de l’amiral, des larmes et des prières de Mme de Condé. Enfin Lassalgue n’est pas revenu. M. le prince a eu beau dire à son frère que les papiers dont il était porteur ne contenaient rien (le cardinal et le duc se regardent en souriant, mais sans mot dire), ce pauvre roi n’en est pas moins tombé dans ses premières perplexités. Et, pour comble de disgrâce, ce même M. de Condé, qui, dans les premiers temps, ne trouvait jamais qu’on allât assez vite, s’est mis depuis quelques jours à rêver trahisons, guet-apens, et à refuser tout net de faire un pas de plus. Maintenant, messeigneurs, vous comprenez ce qu’ils écrivent à la reine.
J’en étais sûr !
Sachez aussi que M. le connétable ne se contente pas de leur avoir écrit ; il veut de sa personne conférer avec eux, et, comme il dit, leur barrer le chemin.
Le connétable !
C’est demain qu’on se rencontrera, probablement à Montargis. Les princes ont fait ce détour pour lui épargner du chemin. Maintenant, messeigneurs, vous voilà bien instruits. Venez à mon secours, ou je ne réponds de rien.
Et que faire ?… Si le roi leur envoyait leur frère le cardinal ?
M. de Bourbon ? envoyez-le si vous voulez. Il n’y fera ni froid ni chaud ; ce n’est pas là ce qu’il faut pour jouter avec le connétable.
Et que vous faut-il donc ?
Si la reine Catherine… Mais voudrait-elle aujourd’hui ?…