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L’INDUSTRIE FRANCAISE


DEPUIS LA RÉVOLUTION DE FÉVRIER.




Au moment où l’industrie française, à peine échappée à d’épouvantables désastres, vient soumettre ses produits à l’épreuve d’une exposition solennelle, il importe que l’on sache dans quel état l’a laissée l’ébranlement si profond de 1848. En quelle proportion les forces productives du pays se sont-elles amoindries ? Quels ont été les moyens mis en œuvre pour suppléer au mouvement régulier des transactions ? Quelles perspectives se déploient aujourd’hui devant la production nationale ? N’y a-t-il pas enfin quelques leçons fécondes à tirer des malheurs mêmes qui l’ont assaillie ? Ce sont là autant de questions qu’on a trop négligées depuis le commencement de la crise industrielle et révolutionnaire, et qui appellent cependant la plus sérieuse attention des économistes.

Le gouvernement de juillet avait imprimé au développement industriel du pays une impulsion considérable. À travers toutes les péripéties de son histoire, sa politique intérieure atteste la constante préoccupation de diriger les activités individuelles vers la vaste arène de l’industrie. Le pouvoir voyait là un moyen pour détourner les esprits des traditions révolutionnaires, toujours si vivaces au sein de notre société. Décorations, éloges officiels, places honorifiques, large part à l’influence politique et aux avantages sociaux, il ne négligea rien de ce qui pouvait susciter des désirs, provoquer des efforts conformes à la pensée dont il était animé. Son initiative a-t-elle donné naissance à un mouvement factice et stérile, ou bien a-t-elle correspondu à un besoin réel du pays ? Il n’est pas possible de méconnaître que la France a suivi son gouvernement dans la carrière industrielle avec un docile empressement. Je n’en voudrais pour preuve que l’attitude des manufacturiers et du public aux trois grandes expositions ouvertes à Paris, à cinq ans d’intervalle, en 1834, 1839 et 1844. Les fabricans s’y disputent de plus en plus l’espace et rivalisent pour accroître l’éclat de ces fêtes