au besoin, un puissant auxiliaire dans la popularité libérale de l’archiduc Jean, qui, trop loyal pour recommencer Philippe-Egalité, peut servir long-temps de trait d’union entre la révolution et le trône. Telle est sans doute aussi l’opinion de M. de Metternich. Personne n’a vu avec plus de satisfaction que lui le vote qui a placé son ennemi intime à la tête de la révolution allemande. « C’est un enfant inoffensif ! » disait-il en apprenant l’élection de l’archiduc, et l’enfant sexagénaire passe à Londres pour accepter assez volontiers les inspirations qui lui viennent de Brighton, nouvelle résidence de M. de Metternich.
L’absolutisme a, chez nos voisins d’outre-Manche, deux autres représentans : le duc de Brunswick et le comte de Montemolin. Le premier fatigue chaque année de ses excentricités et de ses confidences tous les échos judiciaires de Londres, ce qui me dispense d’en parler. Le rôle du second est celui que, d’après le philosophe ancien, devrait envier toute honnête femme : on ne parle pas de lui. Les salons de la haute aristocratie s’ouvrent avec empressement, mais sans déférence d’aucune espèce, devant le jeune prétendant espagnol. Tories et whigs trouvent dans l’Espagne constitutionnelle de quoi défrayer leurs sympathies politiques respectives et leurs visées communes d’influence, ce qui donne, à leurs yeux, au comte de Montemolin un tort immense, l’inutilité. Il n’a tenu cependant qu’à l’héritier de don Carlos de sortir de cet isolement, et de devenir un gage de réconciliation entre la cour d’Espagne et le ministère whig. Le fait que je vais citer était connu de tout le monde politique de Londres, excepté peut-être les diplomates de M. de Lamartine. C’était vers le mois de juin. La révolution de février venait d’anéantir à Madrid les espérances fondées sur les mariages espagnols. Le duc de Montpensier, en cessant de représenter l’alliance franco-espagnole, personnifiait toujours la rupture des cabinets de Londres et de Madrid ; il n’était plus désormais, aux yeux du général Narvaez, qu’un embarras sans compensation. Isolé, menacé même du côté de la France, dont les barbésiens, les blanquistes et les voraces dirigeaient encore plus ou moins la politique extérieure ; non moins isolé et menacé du côté de l’Angleterre, qu’il avait sur le cœur le renvoi récent de M. Bulwer, le gouvernement espagnol crut prudent, pour ne pas être pris entre deux feux, de reconquérir les bonnes graces de celle-ci en lui sacrifiant le prince français. Pour cela, il suffisait de transmettre les droits présomptifs du duc de Montpensier à un autre prince, et le comte de Montemolin, qui pouvait apporter un appoint assez important au parti conservateur espagnol, était naturellement désigné au choix du cabinet de Madrid. Les deux généraux carlistes Batanero et Polo et M. Fernando de la Hoz, rédacteur du journal Carliste de Madrid, la Esperanza, se rendirent auprès du comte de Montemolin pour lui offrir, de la part du général Narvaez, de le reconnaître