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Si le travail nouveau de la pensée ne nous conduit pas à une certaine unité de dogmes, à l’établissement d’une foi incontestée, l’avenir d’aucune institution ne demeure assuré. Voilà bien des années que le vaste problème de l’enseignement préoccupe les assemblées et les esprits, et, si l’on examine les difficultés qui en ont retardé tant de fois la solution, comment ne pas reconnaître qu’elles viennent des incertitudes du temps présent, sur les principes de croyance ? C’est le jésuitisme, on s’en souvient, qui fut le prétexte de la bataille dont l’opinion s’amusait avant que février lui eût imposé des soins plus graves. Les deux partis se donnaient le change, les uns libéraux et ne voulant point du régime de la liberté sous prétexte qu’elle devait profiter aux jésuites, et n’osant pas dire que sous le nom des jésuites ils attaquaient l’église elle-même et sa doctrine ; les autres, il faut le reconnaître, invoquant la liberté sans l’aimer, et demandant l’égalité quand ils désiraient la domination, mais n’osant pas le déclarer ouvertement, comme s’ils eussent eux-mêmes manqué de confiance dans leur doctrine et douté de la légitimité de leur mission.

Le législateur n’a d’autre moyen de résoudre cette difficulté, jusqu’à ce jour insurmontable, qu’en s’attaquant directement à cette dualité funeste qui règne au fond de nos ames entre les sources de nos croyances, entre l’université avec son rationalisme et l’église avec sa théologie.

Cette proposition résume d’ailleurs, dans toute son étendue, la tâche de la science moderne, et, en vérité, plus on réfléchira aux profondes misères intellectuelles et morales dont notre civilisation, malgré tout son éclat, se voit en ce moment affligée, moins on pourra s’expliquer que cette tâche ne soit pas encore plus vivement comprise et plus franchement acceptée par quiconque possède le don de penser. Bien que les institutions aient, par leur seule nature et leur arrangement, une vertu propre, salutaire ou nuisible au corps social, vous aurez beau chercher, dans les changemens politiques, le remède aux souffrances du pays ; vous aurez beau le chercher dans de nouvelles modifications à la forme du gouvernement, soit que vous vouliez le conduire à la république sociale ou le ramener à la royauté ; vous pourrez agir en hausse ou en baisse sur la fortune privée et publique : vous ne trouverez point ce remède dans les expérimentations politiques, parce que le mal est bien moins dans les lois que dans les consciences.

L’enseignement est ainsi le grand but proposé à tous ceux qui ont autorité pour agir sur la société. La religion et l’art, qui tiennent l’empire du sentiment, doivent, dans cette vaste carrière, leur concours aux louables tentatives de la science.

À vrai dire, l’art ne semble guère songer à réclamer son rôle dans le labeur de la journée. Pendant que le chef de l’école moderne donne de