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RÉDEMPTION. 707 LE COMTE JEAN. ’Parbleu! vous qui demandez une extravagance, Maurice a votre affaire toute rôtie... Voyons, cousin, ne vous fâchez pas;... vous avez fort négligé ces dames jusqu’à ce moment,... vous leur devez une réparation; souffrez que je les régale de l’anecdote . MAURICE, sérieux. Comte Jean, je vous supplie... MADELEINE. Ne récoutez pas, comte, car je vous écoute. LE COMTE JEAN. Tant il y a qu’un soir mon cousin Maurice, promenant sa mélancolie sous les ombrages du Prater, entendit tout à coup des sanglots au pied d’un arbre... Des sanglots au pied d’un arbre, se dit Maurice, j’ai vu cela dans des romans... Un voyageur passe dans une forêt.., une femme, belle encore malgré sa pâleur, est attachée au tronc d’un bouleau... des bandits ricanent alentour... Enflammé par ces souvenirs, Maurice s’approche, que dis-je? il s’élance, il vole Étes- vous content de moi, Maurice? La mise en scène vous convient-elle? MAURICE. Parfaitement, comte, LE COMTE JEAN. Au pied de l’arbre était un petit paquet de linge sale qui pleurait; Maurice l’interroge : l’enfant, — chacun a deviné que c’était un enfant, — l’enfant déclare être du sexe féminin et appartenir à des parens goguenards, qui ont jugé plai- sant de l’abandonner sur la voie publique. Maurice, naturellement, maudit les parens, bénit l’enfant, la prend par la main, et les voilà partis. Nous ne les sui- vrons pas, mesdames, à travers le dédale des rues de Vienne; il vous suffira de savoir que, depuis quelque temps, mon jeune cousin, qui a le goût des enfans, comme j’ai, moi, celui des perroquets, rêvait aux moyens de se monter peu à peu une famille : le destin avait donc positivement joué dans son jeu en le fa- vorisant de cette rencontre. Bref, après avoir pris l’avis d’un bourgmestre et avoir fait décrasser la petite fille, il l’adopta, la baptisa du doux nom de Margue- rite, et lui apprit l’alphabet et la musique. 11 y a trois ans de cela; l’enfant doit en avoir neuf aujourd’hui. Dans quelques années d’ici, comme elle est jolie et d’une vive intelligence, Maurice, l’ayant pétrie de ses mains et formée selon son cœur, voudra en faire sa femme : c’est alors qu’elle s’enfuira avec un garçon perruquier. ERLOFF, riant, à Maurice. Monsieur, mon compliment; saint Vincent de Paule n’a qu’à se bien tenir là-haut! d’estival, un peu gris. Vous damez le pion, monsieur, à madame ma mère, qui s’était vouée à l’édu- cation des sarcelles. Je bois à votre prud’homie . MADELEINE. Maâarme votre i»ère élevait aussi des oies, monsieur le duc. — Quant à vous, monsieur Maurice, croyez-en *une femme qui a fait toutes ses études, méfiez- vous du dénoûment prédit par le comte Jean.