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ou égoïsme serait aujourd’hui une lâcheté, une trahison, et à la fin un suicide. « Un peuple, dit M. Guizot, qui a été grand dans un petit coin de terre, et républicain avec gloire en face de la gloire monarchique de Louis XIV, le peuple hollandais, a conquis et maintient sa patrie contre l’océan, en ouvrant partout des canaux et en élevant partout des digues. Que les canaux ne soient jamais fermés, que les digues ne soient jamais entamées ; c’est le travail incessant de tous les Hollandais, c’est le secret de leur succès et de leur durée. Que toutes les forces conservatrices de la société en France s’instruisent à cet exemple : qu’elles s’unissent étroitement, qu’elles veillent ensemble et sans relâche pour accueillir et contenir à la fois le flot montant de la démocratie. »

Mais un sentiment plus noble que la crainte, plus doux que l’avertissement d’un devoir sévère, anime ceux qui se vouent aujourd’hui, au nom de la cause conservatrice et libérale, à une action politique courageuse et constante. L’exercice des libertés publiques, l’initiative politique, ont de mâles joies. L’œuvre à laquelle nous travaillons aujourd’hui est de celles qui allument de nobles enthousiasmes. Refaire la France moderne avec le souvenir et le respect de toutes les traditions, de toutes les gloires d’une nation de quatorze siècles, et avec tous les élémens nouveaux, toutes les aspirations nouvelles qu’a produites la révolution la plus vaste que le monde ait vue depuis la chute de l’empire romain, telle est la mission qui nous est donnée par la Providence. Nous pouvons nous y appliquer aujourd’hui, non certes avec l’assurance du succès, mais avec ce degré de confiance qui encourage à l’action. Tel est le sentiment que le livre de M. Guizot laisse dans l’ame de ses lecteurs : encore une fois, il faut l’en remercier. Il était bien digne d’un grand esprit et d’une conviction profonde de lire et de signaler, à travers un terrible enseignement, une grande espérance.

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