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dans le Niger, paraît être un grand fleuve. On suppose qu’il parcourt une vaste étendue de pays dans l’intérieur de l’Afrique. M. Allen, en particulier, croit qu’en remontant le cours du Tchadda, on arriverait à la mer intérieure nommée lac Tchad, que le major Denham et le capitaine Clapperton ont visitée. Au lieu de recommencer dans le Niger un voyage d’exploration qui n’a plus rien à nous apprendre, du moins jusqu’à l’endroit, au-dessus de Rabbah, où la navigation est interceptée par une barrière de rochers, ne vaudrait-il pas mieux diriger des recherches dans le Tchadda, dont les bords sont encore à peu près inexplorés ? il serait digne de la France de donner la première au monde des informations précises sur ce cours d’eau, dont l’importance paraît certaine. Lors de la dernière expédition dont nous venons de raconter la funeste issue, le Wilberforce, arrivé à la hauteur du Tchadda, devait se séparer de l’Albert et remonter ce fleuve, tandis que ce dernier navire continuerait son voyage dans le Niger. On sait pourquoi M. Allen n’a pu exécuter cette partie de ses instructions. Il serait honorable pour des voyageurs français d’accomplir ce que l’expédition anglaise n’a pas fait, et nous nous réjouirions de les voir engager cette lutte pacifique, qui ne pourrait que tourner au profit de la science.


III. – INSTITUTIONS ET MŒURS DES RIVERAINS DU NIGER.

L’attention des derniers explorateurs du Niger ne s’est pas portée seulement sur ce fleuve même, mais sur les institutions et les usages des populations qui en habitent les bords. Les navires ont mouillé devant trois grands centres de populations : Aboh, Iddah, Egga. Les deux premiers étaient parfaitement indépendans ; le troisième était tributaire des Fellatahs. Les habitans d’Aboh sont païens, ceux d’Iddah sont musulmans ; ceux d’Egga n’ont aucun caractère particulier. Musulmans comme leurs voisins d’Iddah, rien ne les distingue, si ce n’est leur état d’asservissement sous une domination étrangère. Les populations d’Aboh et d’Iddah, qui offrent entre elles des contrastes très frappans, méritent seules de nous arrêter.

À Aboh, les idoles sont nombreuses. Ce sont, en général, des figures humaines sculptées en bois ou en terre. En outre, les habitans suspendent à leur cou des amulettes, auxquels ils attribuent des vertus contre les blessures et les maladies. De longues perches plantées dans l’enceinte de leurs demeures portent plusieurs de ces amulettes protecteurs des personnes et du logis. Ils adorent dans leur principale idole la représentation d’un être mystérieux qui réside dans la profondeur des forêts ; ils lui attribuent la connaissance de tout ce qui se passe sur