Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 1.djvu/230

Cette page a été validée par deux contributeurs.

des Autrichiens. Quinze jours donc après l’abandon du Tyrol, on dirigea de nouveau les corps de volontaires vers Salò. Ni les dispositions, ni l’organisation de ces corps n’étaient changées ; mais l’esprit des populations au milieu desquelles ils retournaient était loin d’être le même.

Le départ des volontaires avait indisposé profondément les paysans tyroliens contre les Lombards et les Piémontais. La consternation était grande dans toutes les vallées. Des créatures de l’Autriche, dont le nom a acquis dans le Tyrol une triste célébrité, les Salvotti, les Torresani, les De Bette, s’abattirent sur la ville de Trente, et y déterminèrent une nombreuse émigration. Une partie de ces émigrés se constitua en comité à Milan et entreprit de défendre les intérêts du Tyrol auprès du gouvernement lombard et du roi de Piémont. Quelques-uns se rendirent au camp pour implorer les secours de Charles-Albert ; d’autres formèrent une légion qui prit le nom de légion tridentine et se joignit aux autres corps francs. Une seconde légion se porta dans la Vénétie et se conduisit héroïquement dans l’affaire de Vicence. Là ne s’arrêtèrent pas les efforts des Tridentins. L’assemblée des états germaniques était déjà établie à Francfort, et elle avait protesté contre l’invasion du Tyrol italien par les troupes lombardes, sous prétexte que, le Tyrol appartenant à la nation germanique, cette invasion n’était rien moins qu’une attaque à main armée, et sans aucune déclaration préalable, contre un pays neutre. Les Tyroliens envoyèrent de leur côté des députés à la diète de Francfort pour repousser, au nom du pays même, la dénomination de province allemande que la diète avait appliquée au Tyrol. « Nous sommes Italiens, dirent ces députés, parce que la nature du pays et des hommes l’a voulu ainsi ; mais nous le sommes aussi non pas seulement à cause des lois de la nature, mais par l’invincible impulsion de notre cœur. Nous sommes Italiens d’abord, nous voulons l’être ensuite ; nous avons le droit et nous tâcherons d’avoir la force de le devenir. Ne vous donnez pas la peine de nous défendre contre les Italiens. Entre les Italiens et nous il n’est aucun besoin d’un médiateur. L’intégrité de votre territoire ne saurait être violée par le fait que les Italiens d’une province vont visiter ou secourir les Italiens d’une autre province. »

Arrivés à Salò, les volontaires furent laissés pendant plus de deux mois dans une inaction absolue et dans le dénûment le plus complet. Quand ils rappelaient la promesse et le projet de l’expédition sur Trente, on leur répondait que le roi de Piémont refusait les secours nécessaires, et que d’ailleurs les protestations de la diète germanique devaient être prises en considération. Les diverses colonnes de volontaires avaient été échelonnées dans l’ordre suivant : Mannara, avec cinq cents hommes, au poste avancé de Monte-Suelo et du pont de Caffaro, à l’extrémité du lac d’Idro ; le commandant Cresia, avec mille hommes,