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prement parler, qu’une guerre de partisans. On ne comprend bien de tels événemens, on ne s’intéresse à tant de bizarres péripéties, qu’à la condition de bien connaître le lieu de la scène, les intérêts mis en jeu, les antécédens historiques qui peuvent servir à éclairer les faits récens. Ces intérêts, ces antécédens sont malheureusement trop ignorés. Le nom même de Tyrol, donné communément aux vallées italiennes dont nous avons à parler, prouve combien peu l’on a de notions précises sur l’état passé comme sur les prétentions légitimes de la population italienne des Alpes méridionales. Exposer les causes historiques de l’insurrection tyrolienne de 1848, décrire le théâtre de la guerre avant de la raconter, c’est là une double nécessité qui trace le plan même de notre récit.


I.

L’Italie s’étend jusqu’au sommet des Alpes, et l’Allemagne commence sur ce même sommet ; le versant méridional de ces montagnes est italien, le versant septentrional est allemand. — Cette disposition des frontières italiennes ne varie que sur un seul point, le Saint-Gothard, dont les deux versans appartiennent tout entiers, non à l’Allemagne, mais à la Suisse. Le Tyrol proprement dit est un pays allemand, qui s’étend depuis le versant septentrional des Alpes jusqu’à la Styrie à l’est, et jusqu’au duché d’Autriche au nord. Quant au pays improprement nommé le Tyrol italien, il commence au versant méridional, et touche, par sa frontière occidentale, aux territoires de Brescia et de Bergame ; du côté du midi, il atteint le Véronais ; du côté de l’est, la Vénétie ; du côté du nord enfin, le Tyrol allemand. Avant de former une sorte d’état compacte, ce pays était partagé entre plusieurs maîtres. Les vallées dites Val Lagana, Val di Ledro, Val di Fieme, Val Lagarina, Giudicarie, Val delle Sarche, Val de l’Adige, Val di Sole, Val de Noun ou Nounia, dépendaient anciennement des états limitrophes, c’est-à-dire des villes de Bergame, Brescia, Vérone et Venise. D’autres parties de ce qu’on nomme aujourd’hui le Tyrol italien étaient enclavées dans le Tyrol allemand. Celui-ci relevait de l’empereur d’Autriche, depuis qu’en 1357 la comtesse de Tyrol, Mathilde, avait adopté les petits-fils d’Albert II de Habsbourg. Le prince-évêque de Trente et Bressanone, souverain de cette principauté, reconnaissait l’empereur d’Allemagne pour suzerain, et avait rang parmi les princes du saint-empire. Les prétentions de l’Autriche sur cette principauté et les vallées voisines, c’est-à-dire sur tout ce qui s’appelle aujourd’hui Tyrol italien, remontent à 1799, époque de la fameuse insurrection des Tyroliens contre les armées françaises. Les habitans de quelques-unes des val-