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Quelle est maintenant la proportion des créances hypothécaires qui, par leur modicité, échapperaient à la taxe ? Un revenu de 400 francs dans les campagnes, de 800 francs dans les villes, correspond à un placement de 8,000 ou 16,000 francs. Un bien petit nombre de prêts atteignent cette somme. Il a été constaté que, sur 329,756 prêts hypothécaires inscrits pendant l’exercice de 1841, les contrats passés pour une somme inférieure à 1,000 francs formaient les trois quarts, et que, pour les placemens au-dessus de 1,000 francs, la moyenne était de 4,630 francs. À ce compte, peu de créanciers seraient dans les limites de la taxe ; mais il est probable que ceux qui ont des économies à utiliser ont d’autres sources de revenus, ou que, par une prudence instinctive chez les campagnards, ils ont divisé leurs placemens en plusieurs petites sommes ; quant aux inscriptions de garantie prises par les anciens propriétaires, elles doivent être le plus ordinairement supérieures aux taux prescrits. On peut donc espérer que les créances hypothécaires seront atteintes presque intégralement, et que leur cotisation, sur un capital d’environ 10 milliards produisant 5 pour 100 d’intérêt, procurera au trésor une quinzaine de millions.

En essayant d’évaluer les revenus de capitaux destinés à commanditer les opérations de crédit, de commerce et d’industrie, nous entrons dans le champ illimité des conjectures. Des recherches faites d’autorité, avec le concours des agens de change, des courtiers et des notaires, ne conduiraient pas même à des appréciations exactes pour ces valeurs essentiellement mobiles, que le flux et le reflux de l’agiotage déplacent sans cesse, et qui, menacées par l’impôt, ne tarderont pas à se dénaturer. Nous allons donc essayer une estimation par simple aperçu, en nous appliquant à ne rien exagérer.

Nous avons parlé plus haut des produits donnés par les banques, à titre, de profits d’escompte ou de courtage, à ceux qui font métier de manipuler l’argent. Indépendamment de ces profits, il y a des intérêts et des dividendes attribués aux capitaux qui forment le fonds social des banques publiques et privées. S’il était possible d’additionner avec exactitude les sommes qui appartiennent, à titre de dépôts où d’actions, aux commanditaires de la banque de France et de ses succursales, du comptoir national, des banques collectives, mais non privilégiées, des comptoirs destines à certaines industries spéciales, à certains genres d’opérations, et enfin de toutes les banques particulières de Paris et des départemens, on reconnaîtrait que les sommes confiées aux banquiers avec charge de les faire valoir, dépassent 600 millions. En calculant à 4 pour 100 l’intérêt produit par ces sommes, ce serait encore 24 millions de revenu imposable.

Quant aux chemins de fer, il est plus facile d’approcher de la réalité. On sait que, sans compter les apports subventionnels fournis par l’état, et en laissant de côté les deux lignes qui doivent conduire de Paris à