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énergie. Quant au Capitole, quoiqu’il soit moins riche que le Vatican, il renferme cependant plus d’une œuvre précieuse. L’Hercule en bronze doré, l’Antinoüs, la Diane, la Junon, seront toujours étudiés avec fruit. Le Moïse de Saint-Pierre-aux-Liens, le Christ de la Minerve, la Pieta de Saint-Pierre, sont encore des leçons excellentes, même après les chefs-d’œuvre de l’art antique. Si le goût n’est pas pleinement satisfait par le style de ces trois compositions, en revanche le savoir qui se révèle dans chaque morceau excite une légitime admiration.

Rome n’est pas, pour l’architecte, une école moins généreuse que pour le peintre et le statuaire. Ruines antiques, palais modernes, tout ce qui peut servir à développer l’imagination se trouve réuni dans l’enceinte de Rome. Le Colisée, le théâtre de Marcellus, les arcs de Constantin, de Titus et de Septime Sévère, le Panthéon et le temple de la Paix, le portique d’Octavie et les colonnes du temple de Jupiter Stator nous montrent l’art antique sous des aspects variés. Le palais Farnèse, le palais Giraud, le palais de la Chancellerie, nous montrent l’art moderne dans toute son élégance, toute sa pureté. Il est impossible de ne pas admirer, d’étudier sans profit la sobriété, la simplicité sévère, qui font du palais Giraud une œuvre exquise. Le palais Farnèse, quoique moins pur, offre pourtant plusieurs parties d’une grande élégance. Quant au palais de la Chancellerie, il est depuis long-temps apprécié par tous les hommes compétens.

Rome n’enseigne pas seulement à l’architecte ce qu’il doit faire, mais bien aussi ce qu’il doit éviter. Si le palais Giraud est un modèle de grace, de simplicité, le palais Doria est une des œuvres les plus ridicules que puisse enfanter l’imagination humaine. Il est difficile, peut-être impossible, de produire un monument d’un style plus tourmenté, plus maniéré ; je ne crois pas qu’il soit permis d’aller plus loin dans le mauvais goût. Et que d’églises je pourrais nommer dont le style ne vaut guère mieux que celui du palais Doria ! Certes, l’architecte qui veut étudier son art trouve de quoi nourrir sa pensée sans sortir de Rome. Il y a dans les monumens que je viens de nommer une variété de formes qui se prête aux comparaisons les plus instructives. Si Rome ne peut tenir lieu d’Athènes, si le goût qui a présidé aux œuvres de l’architecture romaine n’est pas aussi pur que le goût des artistes grecs, il y a cependant une riche moisson à recueillir dans l’étude des monumens romains. Personne, je crois, ne voudra contester l’importance de ces monumens, je parle de ceux qui appartiennent à l’antiquité, non-seulement sous le rapport de l’art proprement dit, mais aussi sous le rapport de la science. Si le goût, en effet, trouve parfois à blâmer, l’esprit demeure confondu en voyant avec quelle sagacité consommée tous les moyens sont réunis et combinés pour assurer la durée de l’œuvre. Le Colisée, debout depuis dix-huit siècles, est là pour attester