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l’égalité brutale des sauvages jusqu’au despotisme oriental le plus absolu. Ce n’est pas ici le lieu d’énumérer les avantages que présentent les Indes néerlandaises au point de vue commercial ; mais les récits des voyageurs et les observations des marins ont constaté depuis des siècles que l’archipel oriental, par les facilités qu’il offre au commerce d’Inde en Inde, est, comme on l’a dit emphatiquement, « le chemin des peuples, » et on peut assurer que jamais la colonisation européenne n’a obtenu sur un point donné de plus magnifiques résultats.

La prospérité toujours croissante des Indes néerlandaises tient à des causes fort variées. Nous avons parlé de deux ordres de difficultés bien distinctes contre lesquelles la politique coloniale des puissances européennes a eu de tout temps à lutter. Nous avons distingué entre les obstacles nés de la résistance des populations indigènes et les embarras, souvent plus graves, créés par la rivalité des intérêts européens. La Hollande a eu à se préoccuper des uns et des autres, et chaque jour elle combat avec succès les premiers comme les seconds. Contre les difficultés intérieures, elle a été admirablement servie par la création de la grande société de commerce (Maatschappey), qui a fait revivre la marine marchande des Pays-Bas, et donné la plus puissante impulsion d’un côté à l’industrie de la mère-patrie, de l’autre à l’exportation coloniale. Le gouvernement de Java a trouvé dans cette société un de ses plus solides appuis. Un autre instrument de la prospérité des Indes néerlandaises a été le système des cultures, dont l’application judicieuse a amélioré au-delà de toute prévision le sort de ces colonies. Contre les difficultés qu’on pourrait nommer extérieures, et principalement contre les tentatives de la politique anglaise, le gouvernement de Java a pu se défendre par le traité même conclu entre la Grande-Bretagne et la Hollande en 1824. Nous ne nous attacherons aujourd’hui qu’aux conséquences et aux dernières applications de ce traité, tant à Bornéo qu’à Mangkassar et dans les autres possessions hollandaises de l’extrême Orient. Nous aurons montré ainsi quels principes règlent les rapports du gouvernement hollandais avec les puissances rivales qu’il rencontre dans l’archipel d’Asie. Quant à ses rapports avec les populations indigènes, quant aux actes de sa politique intérieure, ils soulèvent des questions trop graves pour qu’on ne leur consacre pas une étude spéciale.


II. - TRAITE DE 1824. - QUESTION DE BORNEO.

Le but du traité signé le 17 mars 1824, entre la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, était de régler définitivement les limites territoriales, droits et intérêts respectifs des hautes parties contractantes, dans les Indes orientales, de manière à ce que chaque puissance restât désormais dans le cercle de son action politique, l’une sur le continent asiatique,