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une déclaration de guerre éventuelle ; mais, si vous avez la moindre confiance dans l’intelligence que j’ai des intérêts de la politique de mon pays, tenez pour certain, sur ma parole, qu’un corps de troupes autrichiennes en Piémont y rencontrerait bientôt une armée française. »

« Cette vivacité tranchante, qui n’est pas dans mes habitudes de discussion, a paru faire impression sur le prince de Metternich… »

Le ministre des affaires étrangères du 11 octobre répondit à M. de Sainte-Aulaire par la dépêche qu’on va lire, et qui ne pouvait laisser subsister aucun doute sur l’intention du gouvernement français de s’opposer au besoin par la force des armes à toute intervention de l’Autriche en Piémont.

M. de Broglie à M. de Sainte-Aulaire.
« Paris, 7 décembre 1833.

« Monsieur le comte, j’ai reçu les dépêches que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire. Je n’ai pas lu sans quelque surprise celle où vous me rendez compte de l’entretien que vous avez eu avec M. de Metternich, relativement à mes réponses aux déclarations des envoyés d’Autriche, de Prusse et de Russie…

« Je n’ai pas besoin de vous dire qu’alors même que je n’aurais pas eu connaissance de ce qui avait eu lieu entre vous et M. de Metternich, je n’eusse pas hésité un instant à repousser de pareilles assertions. J’aime à croire que M. Ancillon n’a pas bien saisi le sens des informations qu’on lui a adressées, qu’il se l’est au moins exagéré ; mais l’objet dont il s’agit est trop grave pour qu’il ne soit pas nécessaire de dissiper toute incertitude sur les intentions du gouvernement du roi. Aussi n’ai-je pas perdu un moment pour charger M. Bresson de rectifier la manière de voir du cabinet de Berlin, en lui donnant connaissance du texte même de votre dépêche du 20 novembre. De votre côté, monsieur le comte, vous voudrez bien demander à M. de Metternich quelle peut être l’origine d’un si étrange malentendu. Vous lui direz de plus que, puisque les déclarations que j’ai faites de vive voix aux envoyés des trois cours, et particulièrement au chargé d’affaires d’Autriche, ne paraissent pas avoir été partout comprises dans le sens et la latitude que nous y attachons, nous ne faisons aucune difficulté de les reproduire.

« J’ai dit, je le répète, à M. de Hügel, à M. de Werther et à M. le comte Pozzo, en termes également formels, bien qu’avec les modifications naturellement amenées par la différence de leur attitude, qu’à nos yeux les questions d’intervention étaient des questions exceptionnelles dans lesquelles, les règles du droit commun n’étant plus applicables, chacun agit suivant ses convenances à ses risques et périls ; que de même que les trois cours se réservaient le droit d’intervenir, lorsqu’elles le croiraient utile à leurs intérêts, dans les affaires d’un état indépendant, la France, le cas échéant, serait bien certainement libre de s’y opposer, si elle croyait devoir le faire.

« J’ai dit de plus à M. de Hügel, dont la communication provoquait plus spécialement cet éclaircissement, que la Belgique, la Suisse et le Piémont étaient