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que, la première irritation causée à Paris par cette brusque invasion étant un peu calmée, le cabinet autrichien essaya d’éluder sa promesse en la subordonnant, pour l’exécution complète, à la garantie que les ambassadeurs de France et d’Angleterre, réunis à Rome, donneraient au saint-père pour le maintien de son pouvoir temporel et l’intégrité de son territoire. La fermeté que mit le général Sébastiani à rappeler que les engagemens relatifs à l’évacuation des états pontificaux avaient été pris envers lui seul, et indépendamment de toute garantie, ramena la question à ses véritables termes. L’Autriche dut se résigner de bonne grace à remplir une promesse sur l’exécution de laquelle notre cabinet ne voulait admettre aucune discussion.

La hardiesse de l’occupation d’Ancône frappa tous les esprits ; mais, de peur d’avoir à le louer de cet acte de rigueur, les adversaires obstinés de l’ancien gouvernement donnèrent à entendre que l’intervention simultanée de la France et de l’Autriche avait été consentie avec le cabinet de Vienne. C’est le contraire qui est la vérité. Les personnes bien informées savent que l’expédition d’Ancône fut arrêtée par M. Périer dans la matinée même du jour où il apprit la seconde entrée des Autrichiens dans les Légations. Les ordres furent tout aussitôt donnés à nos forces militaires et navales. La résolution avait même été si soudaine, que notre ambassadeur à Rome, chargé, quelque temps auparavant, d’entretenir le cardinal secrétaire d’état de la nécessité où serait peut-être le gouvernement français de prendre position dans les états du saint-siége, pour contenir les mouvemens de l’Autriche, avait été tout récemment autorisé à lui annoncer que ce projet était, pour le moment, abandonné. Cette circonstance, jointe aux détails de l’occupation de la ville, opérée de nuit et sans avis préalable, avec toutes les apparences d’une attaque de vive force, causèrent beaucoup d’humeur au gouvernement pontifical. Quant à l’irritation du prince de Metternich, il faut renoncer à la raconter, car elle fut telle que le chancelier d’Autriche n’hésita pas à déclarer que la mesure elle-même et les circonstances qui l’avaient accompagnée en devaient faire nécessairement une affaire européenne, tous les cabinets étant également intéressés dans les questions que soulevait une si audacieuse violation du droit des gens. Bientôt après cependant, soit que la colère du prince eût été trop violente pour n’avoir pas eu quelque chose de factice, soit qu’il désespérât d’agir sur le cabinet français par de semblables éclats, les dispositions devinrent plus calmes. La cour de Vienne dut se résigner et souffrir ce qu’elle n’avait pu empêcher.

Nous venons de voir comment les affaires de Belgique, de Pologne et d’Italie nous ont successivement donné maille à partir avec les cabinets de Berlin, de Saint-Pétersbourg et d’Autriche. L’attitude et le