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On la dispose donc dans une petite boîte et l’on chauffe légèrement du mercure liquide disposé dans un réservoir à la partie inférieure de la boîte. Les vapeurs de mercure se dégagent bientôt et viennent se condenser sur le métal ; mais le mercure ne se dépose pas uniformément sur toute la surface métallique, et c’est précisément cette condensation inégale qui donne naissance au dessin photographique. En effet, les gouttelettes de mercure viennent se condenser uniquement sur les parties que la lumière a frappées, c’est-à-dire sur les portions de l’iodure d’argent que les rayons lumineux ont chimiquement décomposées ; les parties restées dans l’ombre ne se recouvrent pas de mercure ; ainsi pour les demi-teintes. Il résulte donc de cet effet curieux que les parties éclairées sont accusées sur la plaque par un vernis brillant de mercure, et les ombres par la surface même de l’argent non impressionnée. Pour les personnes qui assistent pour la première fois à cette curieuse partie des opérations photographiques, c’est là un spectacle étrange et véritablement merveilleux. Sur cette plaque, qui ne présente aucun trait, aucun dessin, aucun aspect visible, on voit tout d’un coup se dégager une image d’une perfection sans pareille, comme si quelque divin artiste la traçait de son invisible pinceau.

Cependant tout n’est pas fini. La plaque est encore imprégnée d’iodure d’argent ; et, si on l’abandonnait à elle-même en cet état, l’iodure continuant à noircir sous l’influence de la lumière ambiante, tout le dessin serait détruit. Il faut donc débarrasser la plaque de cet iodure. On y parvient en la plongeant dans une dissolution d’un sel, l’hyposulfite de soude, qui a la propriété de décomposer l’iodure d’argent. Après ce lavage, l’épreuve peut être exposée sans aucun risque à l’action de la lumière la plus intense ; tout à l’heure on ne pouvait la manier que dans l’obscurité ou tout au plus à la faible lueur d’une bougie ; on peut maintenant l’exposer impunément à l’action directe des rayons solaires. On voit en définitive que, dans les épreuves daguerriennes, l’image est formée par un mince voile de mercure déposé sur une surface d’argent ; les reflets brillans du mercure représentent les clairs, les ombres sont produites par le bruni de l’argent ; l’opposition, la réflexion inégale de la teinte de ces deux métaux suffisent pour produire les effets du dessin.

Tel est l’ensemble des opérations dans le procédé primitif imaginé par Daguerre, et nous devons dire que ce procédé, tel qu’il a été décrit par l’inventeur, est d’une exécution à la fois si simple et si facile, que l’on est assuré de réussir dans tous les cas en suivant à la lettre les instructions qu’il a données. Les perfectionnemens apportés plus tard à la méthode originelle ont eu pour résultat d’abréger le temps des opérations ; mais les manœuvres sont devenues par cela même plus difficiles et le succès moins certain. Lorsque la durée de l’opération est une circonstance secondaire, quand il s’agit, par exemple, de reproduire