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emprunt ayant été négocié, n’y avait-il pas lieu d’en attendre des résultats à peu près analogues ? Cette observation valait la peine d’être faite. Mais n’insistons pas sur ce point.

Ce qu’il importe de discuter, c’est s’il est vrai que la dette flottante fût sur le point de dépasser un milliard, et si la totalité de cette dette, quel qu’en fût le montant, était incessamment exigible.

Dans son rapport du 9 mars, M. Garnier-Pagès avait affirmé qu’au 24 février la dette flottante était de 872 millions. Dans son rapport du 8 mai, c’est à 957 millions qu’il l’évalue. Lequel de ces deux chiffres est le bon ? Prenons le plus récent ; il a d’ailleurs l’avantage d’être plus voisin du milliard. Ainsi, selon M. Garnier-Pagès, la dette flottante, au 24 février, était de 957 millions.

À ce chiffre nous opposons immédiatement le chiffre officiel, le chiffre vrai, celui que nous donne le compte des finances de 1847, publié au mois de mai dernier et dressé par conséquent sous les yeux de l’administration républicaine. Quel était, selon le compte des finances, le montant de la dette flottante ? Il était au 1er janvier de 630 millions.

De 630 à 957, la différence est grande. Il est vrai que le document officiel prend pour date le 1er janvier, tandis que M. Garnier-Pagès nous parle du 24 février ; mais assurément ce n’est pas dans ce court intervalle que la dette s’est accrue de 327 millions. A quelques millions près, la situation était la même aux deux époques. D’où vient donc la différence ?

Elle vient d’un système qui n’appartient qu’à M. Garnier-Pagès ; il a une manière qui lui est propre de composer les dettes flottantes. A l’entendre, il ne faut faire aucune distinction entre les sommes dont le trésor est débiteur à découvert, c’est-à-dire qu’il est tenu de rembourser sans avoir par devers lui aucun gage, aucun nantissement, et celles dont il est, en quelque sorte, plutôt garant que débiteur principal, attendu qu’elles sont représentées entre ses mains par des valeurs négociables et ayant cours sur le marché.

Nous voulons parler, comme on voit, de cette portion de la dette du trésor qui provient des versemens successifs opérés d’années en années par les caisses d’épargne depuis l’époque de leur fondation, depuis trente ans environ. Le solde de ces versemens était, au 24 février, de 355 millions ; mais sur cette somme 65 millions seulement sont demeurés dans les mains de l’état et ont été employés par lui à l’acquit des dépenses publiques ; le reste a reçu, en vertu d’autorisations législatives, une destination toute spéciale ; avec ces 290 millions, il a été acquis, soit sur la place, soit par voie de consolidation, des rentes et autres effets publics : les arrérages de ces rentes sont exclusivement affectés au service des caisses d’épargne, et les titres en sont confiés à la garde et sous la tutelle de la caisse des dépôts et consignations.