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était fini à Vicence, et que les Autrichiens victorieux se trouvaient déjà de retour à Vérone. Pourquoi cette lenteur dans la marche des troupes piémontaises ? Leurs chefs répondirent qu’elles étaient fatiguées, et que l’on avait compté sur les six ou huit jours dont avait parlé le général Durando. Je raconte exactement et n’explique pas. Que l’on me permette pourtant d’ajouter que ma conviction personnelle a toujours été favorable au général Durando. Je ne saurais dire quelle peut être sa justification, car il me semble qu’en pareil cas des ordres secrets, de quelque part qu’ils viennent, ne peuvent être considérés comme une justification satisfaisante. Si peu favorables que soient les apparences au chef de l’armée romaine, quelles qu’aient été les tristes conséquences de sa conduite, je me dois à moi-même de déclarer que j’ai connu personnellement le général Durando, et que j’ai toujours cru voir en lui un homme d’honneur et de sens, ami sincère de son pays, incapable d’une bassesse et d’une lâcheté, un de ces hommes enfin sur lesquels, dans des momens difficiles, on se repose avec une pleine confiance. J’ai voulu faire ici cette déclaration pour soulager mon propre cœur et pour persuader le général, comme tous ceux dont je pourrai avoir à parler ici avec quelque sévérité, que ce n’est point la colère de la défaite qui dicte mes paroles, que ce ne sont pas des préventions défavorables qui me portent à faire peser sur eux la responsabilité de tous nos malheurs. Le seul sentiment auquel j’obéis, c’est le désir de justifier mon pays, en faisant retomber les torts qu’on lui attribue sur les vrais coupables. Les populations italiennes, les Lombards et les Vénitiens en particulier, ont été admirables pendant ces quatre mois. Leurs chefs ont commis des fautes énormes, dont la nation porte aujourd’hui la peine. Si l’Italie souffre pour les fautes d’autrui dans ses intérêts, dans son indépendance, sa liberté, son existence, je voudrais empêcher da moins qu’elle n’en souffrît aussi dans son honneur.

On a vu, par la campagne du général Durando, quelle étrange direction avait été donnée aux opérations du contingent romain. En montrant quel a été le sort d’autres corps auxiliaires, je continuerai la justification de la nation italienne, qui n’a rien négligé, on pourra s’en convaincre, pour prendre sa part des dangers de la guerre.

La Toscane offrit, dès le premier jour, cinq à six mille volontaires, dont une partie fut employée au blocus de Mantoue. Ces malheureux furent traités avec une négligence inhumaine et que j’aurais hésité à croire, si je n’avais eu sous les yeux le témoignage écrit de leur chef. On leur confia le côté des marais, et on les oublia pendant plus d’une semaine dans cette position mortelle. Les marais qui baignent d’un côté les murailles de Mantoue forment un véritable lac d’eau stagnante, et un homme debout dans ces eaux y enfonce jusqu’à mi-corps. C’est là, debout dans ces eaux, que les soldats toscans furent laissés pendant