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de la consommation serait le même que dans l’hypothèse précédente, et, à ce point de vue, nous n’avons rien à changer à nos calculs. Seulement la part du trésor public serait moins belle, bien que toujours fort supérieure à celle que lui fait le régime présent. Ce qu’il y aurait peut-être de plus fâcheux dans cette combinaison, c’est que la fabrication du sucre indigène, qui entrerait en partage du privilège colonial, continuerait probablement ses envahissemens, envahissemens aussi funestes aux intérêts agricoles qu’aux intérêts maritimes du pays. Si l’on ne peut pas, si l’on ne doit pas désirer la ruine de cette industrie, aujourd’hui qu’elle existe et que de grands capitaux y sont engagés, on doit désirer du moins qu’elle demeure renfermée dans ses limites présentes. On l’y contiendrait, selon toute apparence, avec un régime d’égalité parfaite, qui serait pourtant très favorable à l’écoulement des produits ; mais en maintenant un privilège, si faible qu’il fût, nous craindrions que l’on n’y parvînt pas si sûrement. Et puis, n’est-ce donc rien que l’affaiblissement des recettes publiques, dans un temps où nos finances sont délabrées et où la question financière est précisément la clé de toutes les autres ? Ce sont ces considérations, jointes à l’insuffisance notoire de la production de nos colonies, qui nous feraient repousser, par rapport aux marchandises qui nous occupent, tout régime de transition.

Il nous reste à jeter maintenant un coup d’ail général sur tout ce qui précède.

Le tarif simplifié tant par la suppression totale des droits à l’exportation que par une large réduction du nombre des articles taxés à l’importation ; les matières premières mises à la portée de l’industrie et les objets de consommation usuels à la portée du peuple ; la position de notre marine marchande améliorée et son rôle agrandi, non-seulement par l’abaissement du prix de tous les matériaux de construction des navires, mais encore et surtout par un énorme accroissement des élémens du fret ; les recettes de la douane augmentées de 30 à 35 millions dès la première année et plus que doublées en quatre ans ; nos finances rétablies, et par là toutes les améliorations intérieures rendues possibles : tels seraient les résultats généraux de la réforme dont nous venons de dérouler le tableau. Et tout cela peut être obtenu sans effort, sans crise, sans aucune perturbation fâcheuse, disons même sans qu’aucun intérêt existant ait à souffrir.

Que cette réforme doive être favorable, en effet, à l’industrie, au commerce et à l’agriculture, c’est ce que nous avions tâché de prouver d’avance dans les études auxquelles nous nous sommes livré précédemment. Tout le monde ne l’avouera pas, sans doute ; nous espérons toutefois que les esprits non prévenus le reconnaîtront dès à présent ;