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une intention poétique convenablement exprimée dans le caractère de la tête, et le marbre est traité sans mollesse et sans sécheresse, à la manière de M. Clesinger.

L’Hercule étouffant Antée, de M. Étex, petit modèle en bronze d’un groupe colossal que cet esprit aventureux et fécond avait projeté, a un accent bien autrement énergique. On retrouve dans ce projet la verve puissante de l’artiste que tourmente le besoin de produire, et qui, pour exprimer sa pensée, emploie tour à tour le ciseau, la brosse et le burin. À part quelques négligences, les traductions du Prométhée d’Eschyle, de l’Électre de Sophocle, des Phéniciennes et de l’Hippolyte d’Euripide, que M. Étex a récemment exécutées avec le burin, sont une des œuvres remarquables de ces derniers temps.

L’exposition de sculpture a été fort considérable cette année. Les groupes et les statues en bronze et en marbre sont en grand nombre, et nous doutons que, de long-temps, nous puissions revoir dans les salles du Louvre une pareille réunion, nous ne dirons pas de chefs-d’œuvre, mais d’œuvres recommandables. Les statuaires religieux ont surtout beaucoup produit. MM. Breysse et Dumoutet nous ont donné deux Christ en croix : le premier, de dimensions moyennes, exécuté en bois ; le second, moulé en plâtre. Le plus grand défaut de ces morceaux est de ressembler à tous les Christ connus. Nous leur préférons le modèle énergique que M. Préault vient d’exécuter, mais qu’il n’a pas envoyé an Salon. Il y a là une pensée et une personnalité, ce qui est rare aujourd’hui. Le Christ au jardin des Oliviers, de M. Dieudonné, est bien défaillant. C’est de la sculpture expressive qui laisse beaucoup à désirer quant au caractère et à l’étude. Le Dépouillement du Christ, de M. Justin, indique un grand savoir-faire ; mais là encore la pratique ne supplée pas à l’étude de la nature. Nous avons, en outre, des bustes de Christ en marbre et en plâtre ; des têtes de Christ en argent, ronde bosse repoussée au marteau ; puis un crucifix de M. Hugenin en bas-relief ; une Résurrection du Christ, de M. Iguel, vaste bas-relief destiné à la décoration d’un maître-autel, etc. Les Vierges sont plus nombreuses encore que les Christ. Nous avons une Vierge, en marbre de Visille, exécutée par un anonyme, ouvrage consciencieux, mais faible ; la Vierge-mère, de M. Bonnassieux, dont nous avons parlé ; la Sainte Vierge présentant l’Enfant Jésus, statue en marbre de M. Gayrard père ; la Vierge présentant au monde son divin fils, groupe en bois de M. Gayrard fils ; la Vierge et l’Enfant Jésus, de M. Huguenin ; la statuette de la Vierge de M. Vanlinden ; la Vierge allemande, de M. Charles Yon, statuette en plâtre d’après Albert Dürer ; enfin plusieurs Visitations, dont l’une de M. Triqueti, bas-relief, ou plutôt grande mosaïque en marbre, exécuté, ainsi qu’une Sainte Famille et un sujet allégorique, comme essais de décorations murales, applicables aux églises ou aux monumens publics.