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paraît pas douteux que l’accroissement de la consommation compenserait assez promptement l’abaissement du droit, car les emplois de ces produits sont tellement nombreux et si variés que des quantités doubles des quantités actuelles se placeraient sur nos marchés sans y causer le moindre encombrement. De ce côté donc, nulle diminution à subir sur le produit. Il n’en serait pas de même pour le coton en laine. Quoique l’emploi en soit très étendu, il est beaucoup moins varié et moins susceptible aussi d’un accroissement immédiat. Il ne faudrait pas croire pourtant que la perte serait égale à l’abaissement du droit[1]. Ce que nous pouvons admettre, c’est donc que la recette sur cet article tomberait des deux tiers, et c’est beaucoup. Elle se réduirait ainsi de 13 millions, chiffre actuel, à 4,300,000 francs. Ajoutant à cette somme celle d’un million, que nous avons trouvée pour les lins et les chanvres, nous aurions, pour l’ensemble du chapitre, au lieu de 14,283,000 fr., une recette totale de 5,300,000 fr. La perte serait donc de 8,983,000 fr. C’est la plus forte que nous ayons eu à signaler jusqu’à présent.

Teintures et tanins. — Encore un chapitre à supprimer entièrement. Il se compose de vingt et un articles, compris sous les dénominations suivantes : garance, orcanète, quercitron, curcuma, écorces à pin, à tan et de grenade, pastel, lichens tinctoriaux, safran, carthame, nerprun, noix de galle, avelanèdes, gousses tinctoriales, sumac et fusten, et libidibi. Le produit total n’a été, en 1845, que de 192,314 fr. Inutile de faire ressortir tout ce qu’aurait d’avantageux pour l’industrie l’affranchissement complet des matières tinctoriales, pour un pays surtout qui excelle dans l’impression des étoffes et la teinture. Par la médiocrité de la recette, on voit, en outre, que le trésor n’est pas fort intéressé au maintien des droits. Que si l’on craignait la concurrence que ces produits pourraient faire aux nôtres, nous dirons qu’il en est plusieurs dont nous n’avons pas même les similaires, et que, pour les autres, comme la garance, nous n’avons pas de rivalité sérieuse à craindre, puisque nous sommes nous-mêmes les principaux exportateurs de ces produits. En effet, l’importation de la garance, tant en racines que moulue ou en paille, n’a été, en 1845, que de 142,000 kilog., tandis que l’exportation s’en est élevée à plus de 13 millions. Il en est de même, quoique dans une moindre mesure, pour le pastel. Nous ne croyons pas d’ailleurs qu’il y ait aucune raison pour maintenir des droits sur un seul de ces produits.

On rencontre, dans le tarif actuel, à propos de ce chapitre, deux prohibitions

  1. On comprend bien qu’il y a un peu d’éventualité dans ce calcul. L’accroissement de la consommation, après l’abaissement du droit, peut dépendre de l’abondance de la récolte aux États-Unis et du prix auquel le coton en laine s’élèverait dans ce pays ; mais, comme cette éventualité se rencontre également dans le régime présent, nous n’avons pas à en tenir compte.