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disposition de la maison de Savoie ou de la maison de Toscane ; mais là s’arrêtera au moins pour long-temps, nous le croyons, le mouvement unitaire italien. Pour la réalisation de l’unité absolue, la monarchie constitutionnelle aussi bien que la république rencontrerait des obstacles difficiles à surmonter dans le moment présent. Pendant long-temps encore, il faudra, nous le croyons, s’en tenir à la formule de M. Gioberti, l’unité fédérative, la papauté restant le centre et la métropole morale de la ligue, et Rome le siège d’une diète qui délibérera sur les questions d’intérêt général et devra surtout préparer l’assimilation complète des différens états par l’adoption d’un système uniforme de législation, de douanes, de monnaies, de poids et mesures. Pie IX s’est déclaré chef de la ligue italienne. C’est à lui en effet, c’est au promoteur de l’indépendance, au premier citoyen de l’Italie que cet honneur était dû, et aussi long-temps que ses successeurs sauront marcher sur ses traces glorieuses, la papauté restera en possession de présider aux destinées de la confédération italienne.

Quant à nous, après avoir salué le réveil de l’Italie et suivi d’un regard sympathique les phases successives du mouvement qui l’a conduit à l’unité, nos souhaits doivent être pour la prompte réalisation d’une forme de gouvernement qui, en traduisant la pensée nationale, la mettra le plus tôt en état de se suffire à elle-même et de repousser toute attaque extérieure. C’est pourquoi l’intérêt bien entendu de la France républicaine est de voir se fonder un royaume constitutionnel de la Haute-Italie qui couvre comme un bouclier le reste de la péninsule et y mette pour toujours la liberté à l’abri de l’oppression autrichienne. Toute autre tentative désunirait le faisceau des forces nationales, rendrait à l’Autriche son ascendant, et, en prolongeant la lutte, nécessiterait de notre part une intervention, signal de la guerre européenne. Vouloir faire prédominer chez une nation voisine telle ou telle institution gouvernementale, parce qu’elle offre plus de ressemblance avec celles qui nous régissent, serait d’une politique étroite et rétrospective qui, nous n’en doutons pas, a fait son temps. La république, quand elle a proclamé par la bouche de M. de Lamartine l’indépendance des nations dans le choix du régime intérieur qui leur convient et le respect des nationalités, a établi le véritable principe sur lequel doit reposer désormais notre politique extérieure, celui qui, en nous assurant l’alliance des peuples, fondera l’ère pacifique que la révolution de février a la mission d’inaugurer.