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ne sauraient manquer d’avoir faites sur un point qui intéresse à un si haut degré l’honneur de l’astronomie française.

Nous ne ferons pas mention des luttes que M. Le Verrier a eu dernièrement à soutenir contre d’autres savans français. A quoi bon s’arrêter à de pareils spectacles ? Est-ce donc la première fois que certaines personnes ont essayé de briser les idoles qu’elles avaient présentées d’abord avec complaisance à l’adoration de la foule ? Ces difficultés, ces jalousies sont inséparables du véritable mérite ; mais nous avons l’assurance qu’elles ne seront jamais provoquées par aucun de ces illustres savans dont le nom est si cher au pays. En possession, à la Faculté des sciences de Paris, d’une chaire au pied de laquelle les auditeurs accourent par centaines, en correspondance habituelle avec tous les astronomes de l’Europe, qui aiment à le prendre pour interprète de leurs découvertes auprès de l’Institut, jouissant d’une célébrité universelle à un âge où d’autres commencent à peine à faire entendre leur voix, que manque-t-il à M. Le Verrier ? Il est vrai qu’un projet de règlement, en discussion dans ce moment-ci à l’Académie des Sciences, contenant certaines dispositions qui tendent à limiter les droits dont les membres de cet illustre corps ont joui jusqu’à présent, pourrait donner quelques inquiétudes à des hommes qui, comme M. Le Verrier, sont appelés à prendre souvent la parole : mais nous avons l’assurance que ces inquiétudes ne tarderont pas à se dissiper. L’Institut est un corps trop haut placé pour que l’espoir de faire prévaloir des intérêts personnels puisse se présenter sérieusement à l’esprit d’aucun académicien. Si, par suite d’un règlement dont les effets n’auraient pas été bien calculés, le journal de l’Académie des Sciences, les Comptes-rendus, pouvait cesser d’offrir à chaque membre les moyens d’une publication libre et prompte de leurs travaux ou des débats qui s’élèvent parfois entre eux, un nouveau journal ne tarderait pas à venir satisfaire les besoins essentiels de la publicité académique. Mais ne discutons pas une hypothèse inadmissible. Ce serait là le signal d’une scission à laquelle la science n’aurait rien à gagner et que nous repoussons de toutes nos forces.

Il est des questions dont l’intérêt scientifique disparaît devant des considérations éminemment pratiques et qui touchent aux intérêts les plus chers de la société. De ce nombre est la recherche des divers moyens propres à reconnaître la falsification des farines. Les classes pauvres sont particulièrement intéressées à la solution de ce problème. On sait en effet que le pain de qualité inférieure dont elles se nourrissent supporte bien plus facilement que le pain de première qualité le mélange de matières étrangères plus ou moins pauvres en principes alimentaires. Depuis long-temps, la société d’encouragement pour l’industrie nationale avait appelé sur un sujet aussi important l’attention des chimistes et celle des boulangers. De nombreuses recherches avaient été entreprises, et plusieurs récompenses avaient encouragé les efforts des expérimentateurs. La solution néanmoins devait se faire long-temps attendre, et ce n’est que récemment qu’un résultat sérieux est venu couronner une longue série d’expériences. Ces lenteurs, ces tâtonnemens s’expliquent : il s’agissait, ne l’oublions pas, d’un problème doublement délicat, puisque ni l’hygiène publique, ni la probité commerciale ne pouvaient admettre qu’une seule chance en pareille matière fût laissée au doute ou à l’erreur. Si à la certitude des moyens proposés se joignait un mode d’exécution facile et prompt, à la portée de ceux-là même qui ne sont point