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a remis les partis aux prises. M. Sagasti, comme on sait, avait demandé la production de la liste officielle des paiemens faits sur le trésor de la Havane depuis 1844, et l’opposition prétendait qu’outre la pension de la reine Christine, le gouvernement avait payé des sommes considérables pour établir une monarchie au Mexique, et autant pour faire une expédition dans la république de l’Équateur.

Sur ces deux derniers points, il n’y a pas eu de discussion sérieuse ; mais une lutte des plus vives s’est engagée sur la question de la pension de la reine Christine. M. Beltran de Lis, au nom du ministère, a déclaré qu’en effet la pension de la veuve de Ferdinand, illégalement supprimée au moment de la régence d’Espartero, avait été rétablie, et que les arrérages en avaient été payés, mais qu’il n’y avait dans cette mesure rien que de constitutionnel, et que les arrérages de la pension d’Espartero avaient été également payés. La reine Christine a trouvé des défenseurs encore plus chaleureux dans ses partisans personnels, MM. Mon et Pidal. M. Mon a quitté le fauteuil de la présidence pour prendre une part active au débat, et M. Pidal, au milieu d’un tumulte qui rappelait les anciens jours, a porté le ravage dans les rangs des amis d’Espartero. M. Sagasti, voyant la fortune tourner contre le duc de la Victoire, a voulu retirer sa motion ; mais les amis de la reine Christine ont mieux aimé épuiser le débat, et une majorité considérable, 121 voix contre 29, a donné la preuve de leur force. Après cette discussion, on a généralement cru que MM. Mon et Pidal entreraient dans le cabinet ; mais cette modification paraît encore ajournée.

En Allemagne, nous n’avons guère à noter que la mort du prince électeur de Hesse-Cassel. On sait que ce prince trop original avait été déchargé depuis 1831 des soucis du pouvoir. A la suite de la révolution de France de 1830, le mouvement politique imprimé à divers états de l’Europe avait, entre autres résultats, produit dans la principauté de Hesse-Cassel l’établissement d’une constitution, l’exil du prince régnant, et la nomination de son fils comme régent. C’est ce prince exilé qui vient de mourir.

Son fils, le prince Frédéric-Guillaume, lui succède. Bien qu’élevé prématurément au pouvoir par une révolution, le nouvel électeur ne paraît pas disposé à rester fidèle, comme souverain régnant, à la constitution qu’il avait acceptée comme régent. Il voudrait, à ce qu’il semble, faire la répétition de ce qui s’est passé en Hanovre quand le duc de Cumberland y est venu prendre la couronne. Ainsi, il a commencé par refuser de prêter serment à la constitution ; mais les états, c’est-à-dire les chambres, ont arrangé la difficulté en déclarant qu’ayant prêté déjà le serment comme régent, il n’avait pas à le renouveler comme prince régnant. L’électeur, enhardi par ce premier succès, a voulu faire prêter par l’armée un serment de fidélité à sa personne, mais soldats et officiers ont répondu que c’était à lui de leur donner l’exemple. Le prince, très mécontent, en a appelé à la diète et demande à être relevé de la constitution.

Bien que ces événemens aient produit beaucoup d’agitation dans le petit monde constitutionnel de l’Allemagne, il ne faudrait cependant pas s’en exagérer la portée ou en attendre de graves conséquences. On a vu, par exemple, que, dans le Hanovre, la résistance constitutionnelle, après avoir fait beaucoup de bruit, avait fini par s’évaporer et par s’éteindre. L’électeur de Hesse a devant les yeux cet exemple, et compte se tirer de sa lutte avec la constitution aussi heureuse-