Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 21.djvu/150

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les personnages est pleine de grace et de légèreté. La lumière, distribuée avec adresse, avec bonheur, agrandit l’espace et donne à la scène une profondeur qui étonne et charme les yeux. Aristote et Platon, qui dominent la composition, expliquent assez clairement la nature du sujet ; l’Éthique et le Timée ne laissent aucun doute dans l’esprit du spectateur. Archimède, Pythagore, Diogène, Zoroastre, représentés chacun d’une façon caractéristique, se nomment d’eux-mêmes et ne permettent pas à la pensée d’hésiter un seul instant. La philosophie, telle que Raphaël la concevait, telle qu’il a voulu l’exprimer, n’est pas seulement la science que nous appelons aujourd’hui de ce non ; c’est la réunion de toutes les connaissances acquises par le libre usage de la raison, sans l’intervention de la foi. En d’autres termes, c’est l’alliance de la philosophie morale et de cette autre philosophie qu’on appelle philosophie naturelle, qui comprend le cercle entier des spéculations humaines depuis la géométrie jusqu’à la physiologie. Je ne crois pas qu’il soit possible d’exprimer plus clairement le caractère auguste et majestueux que donne au visage l’habitude des hautes pensées. Aristote et Pistou portent sur le front l’empreinte lumineuse des études qui ont rempli toute leur vie. Il n’y a pas, dans cette imposante réunion de savans et de sages, un personnage qui ne mérite une attention spéciale, tant l’auteur s’est attaché à varier les physionomies.

La Jurisprudence, divisée en deux sujets, la jurisprudence civile et la jurisprudence canonique, offre un choix heureux de figures, mais ne saurait être comparée, pour l’importance de la composition, à la Théologie et à la Philosophie. Toutefois on ne peut s’empêcher d’admirer le Justinien placé à gauche du spectateur, et le Grégoire IX que Raphaël, par une flatterie ingénieuse, a représenté sous les traits de Jules II. Ces deux personnifications du droit civil et du droit canonique sont traitées avec une simplicité magistrale.

La Poésie ou le Parnasse, qui fait face à la Jurisprudence, soutient dignement la comparaison avec la Théologie et la Philosophie. Le mur sur lequel Raphaël a développé cette vaste composition est coupé dans sa partie inférieure, comme le mur où il a représenté la Jurisprudence, par une fenêtre dont la lumière blesse d’abord la vue et s’oppose à l’étude du sujet. Pourtant, au bout de quelques instans, le regard embrasse sans effort l’ensemble harmonieux de ce poème païen, et contemple avec ravissement tous les personnages que le pinceau de Raphaël a semés à profusion sur cette muraille vivante. Ici encore Pétrarque a servi de guide au Sanzio. Par un caprice que nous avons peine à nous expliquer aujourd’hui, mais qui au début du XVIe siècle n’étonnait personne, Apollon tient un violon au lieu d’une lyre ; la tête respire à la fois l’inspiration et la volupté. Quant aux Muses, elles sont toutes, sans exception, d’une beauté divine. L’expression du visage, la grace des