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un jour représentées par notre excellent ami monsieur de Balzac ave toute la pompe de son éloquence. » Cette pompe ne déplaisait pas au chevalier ; il en tenait lui-même, et, sous ses airs d’homme du monde, il avait du collet-monté, comme disait de lui Mme de Sévigné. Entre Balzac et Voiture, le chevalier n’hésitait pas ; il était pour le premier, et il se risqua souvent à critiquer le second, avec qui il était en commerce également. On peut conjecturer, par quelques passages des Lettres du chevalier, que Voiture, cet aimable badin, l’avait pris moins au sérieux que n’avait fait Balzac, et qu’il en était résulté quelque pique d’amour-propre entre eux. Balzac, dont les œuvres subsistent bien plus que celles de Voiture, avait incomparablement moins d’esprit comme homme, et peu ou point de discernement des personnes. « Cet homme, qui faisoit de si belles lettres, dit quelque part le chevalier en parlant de Voiture, voulut être de mes amis en apparence ; je voyois qu’il disoit souvent d’excellentes choses, mais je sentois qu’il étoit plus comédien qu’honnête homme ; cela me le rendoit insupportable, et j’aimois Balzac de tout mon cœur parce qu’il étoit tendre et plein de sentiments naturels[1]. » On devine, sous ces beaux mots, ce que l’amour-propre ne sait pas voir ou ne veut pas dire. C’est, au reste, à la suite de ces deux épistolaires que vient se classer le chevalier et qu’il mérite d’avoir rang dans notre littérature. Ses Lettres participent de la manière de tous deux ; il a beaucoup plus de finesse d’esprit et plus d’observation morale que Balzac ; il sait par momens le monde tout autant que Voiture ; son analyse est des plus nuancées, mais sa déduction est lente, sans légèreté, sans enjouement. Il écrivait un jour à quelqu’un :

« Vous m’écrivez de temps en temps de ces lettres qu’on lit agréablement, et surtout quand on a le goût bon ; mais elles coûtent toujours beaucoup, et je ne crois pas qu’on en puisse faire plus de deux en un jour. Balzac me dit une fois qu’avant que d’être content d’un certain billet au maire d’Angoulême, il y avoit passé plus de quatre matinées. Je ne trouve pourtant rien dans ce billet ni de beau ni de rare, et plus je le considère, moins j’en fais de cas. Voiture se plaignoit aussi de la peine que lui avoit donnée la lettre de la carpe, et, sans mentir, il en étoit à plaindre[2]. »

Mais Voiture, quoi qu’il en dise, avait l’à-propos, la rapidité, le don du moment ; ce qui n’empêche pas aujourd’hui les Lettres du chevalier d’être bien plus intéressantes et plus instructives pour nous que les siennes.

Les Lettres du chevalier, en effet, abondent en particularités qui touchent à la fois à l’histoire de la langue et à celle des mœurs, et qui nous y font pénétrer. Littérairement, elles sont antérieures à la révolution

  1. Lettre 128e.
  2. Lettre 99e.